Toutânkhamon n’a pas été un grand roi. Il n’a vécu que 18 années et soyons honnête, il n’a pas fait grand-chose. Mais si je vous parle de lui, aujourd’hui, c’est bien parce qu’il a marqué l’Histoire d’une manière exceptionnelle.
Son nom est associé à ce qui est peut-être la plus grande découverte de l’égyptologie. Il y a 100 ans le 4 novembre 2022, Howard Carter, un archéologue anglais a découvert la sépulture de Toutânkhamon dans la Vallée des Rois. Une tombe fourmillante de richesses et, fait rarissime, presque intacte. L’étude de sa momie montre que Toutânkhamon n’était clairement pas en forme. Il avait un pied-bot causé par une maladie des os, le paludisme, une fracture infectée à la jambe, sans oublier les déficiences génétiques liées à la consanguinité (ses deux parents étaient frères et sœur).
À partir du moment où son tombeau est mis à nu par Howard Carter, le pharaon se déchaîne. C’est le moment de vous parler de la malédiction qui aurait frappé de mort ceux qui ont profané sa tombe...
Peu de temps après avoir assisté à l’ouverture de la chambre funéraire, Lord Carnarvon le mécène de la découverte de la tombe, est pris de suées, de fièvre et il décède le 5 avril 1923 à l’âge de 57 ans. Cause de la mort : une piqûre de moustique qui se serait infectée ce qui aurait causé une septicémie doublée d’une pneumonie. Il faut dire que le Lord avait la santé fragile, mais sur le chantier, le bruit court : c’est la vengeance du pharaon qui s’exerce.
La presse tient là une histoire géniale. Il faut dire qu’elle est en manque d’anecdotes croustillantes à raconter sur Toutânkhamon : Howard Carter a réservé l’exclusivité de ses infos au Times alors il faut bien se laisser aller à un peu de sensationnalisme pour vendre du papier.
En 1923, le financier George Jay Gould meurt d’une pneumonie. Il avait contracté une fièvre après la visite de la tombe. Les médias s’emballent. En 1924, le professeur Hugh Evelyn-White, collaborateur dépressif de Carter se suicide. Il était l'un des premiers à avoir pénétré dans la chambre mortuaire. Pas de doute pour les journaux, c’est encore la malédiction.
En 1929, Richard Bethell, le secrétaire de Carter est retrouvé inanimé dans son lit après un accident vasculaire. Pour la petite histoire, le père de Bethell se suicide le même jour et sur le chemin de son enterrement, le corbillard écrase un gamin. Vous avouerez que ça a des airs de série noire !
Je vous le dis tout net : j’adore les histoires de malédictions dans les bouquins d’Agatha Christie ou dans les albums de Tintin, mais dans la vraie vie, je n’y crois pas. Certains scientifiques se sont quand même demandé si l’atmosphère de la tombe n’avait tout de même pas favorisé certains décès, car parmi les victimes, on dénombre un taux assez élevé de pneumonies asphyxiantes.
Les hypothèses ont été nombreuses au cours du XXe siècle : les fientes de chauves-souris auraient-elles pu transmettre un virus ? Mais il n’y avait pas de chauves-souris dans la sépulture. Ou seraient-ce les moisissures engendrées par les fruits et légumes laissées pour nourrir le pharaon mort qui ont pu taquiner le système immunitaire de personnes déjà affaiblies ? L’hypothèse est plus crédible. On sait que le tombeau était grignoté par l’humidité et squatté par un champignon allergène : l’aspergillus.
Quoi qu’il en soit, champignon ou pas champignon, malédiction ou pas malédiction, la mort n’a frappé qu’une minorité de gens à avoir visité la dernière demeure de Toutânkhamon. La reine Elizabeth de Belgique est venue à de nombreuses reprises taquiner la momie, et bien, elle n’en a pas perdu la santé pour autant.
Quant à la fille de Carnarvon, la jeune Lady Evelyn, présente à tous les grands moments d’exploration du tombeau, elle s’est éteinte presque octogénaire. Sans parler d’Howard Carter lui-même, qui a passé un temps fou dans la sépulture et qui a survécu 17 années à son ouverture.
Tueur ou pas, Toutânkhamon a continué de passionner les foules tout au long du XXe siècle. Après être devenu la star des faits-divers, il est devenu la star des musées. Bien sûr, il est la vedette du musée égyptien du Caire où il est conservé depuis sa découverte. Mais, à partir des années 1960, il est aussi devenu la coqueluche de grandes expositions à l’étranger. Bon, ça lui vaudra une petite réactivation de la malédiction.
En 1967, le directeur des antiquités du musée du Caire, Mohammed Mehri, est foudroyé par une hémorragie cérébrale juste après avoir signé l’autorisation de sortie du territoire des objets de la tombe de Toutânkhamon. Punition divine pour avoir envoyé le trésor faire une tournée en Europe et aux États-Unis ? En tout cas, c’est pour la bonne cause. Avec les bénéfices, l’Egypte a pu financer le sauvetage de ses temples antiques en Nubie.
Nul doute que si avait retrouvé intactes les sépultures d’un Ramsès, d’un Thoutmôsis, d’une Hatchepsout, ou encore d’un Akhenaton, la figure de Toutânkhamon aurait été largement éclipsée par l’héritage d