Un candidat à la présidentielle doit-il se déclarer avant ou après ses rivaux ? Se lancer tôt, au risque de lasser, ou temporiser, quitte à prendre du retard ? Des personnalités telles que François Fillon, Alain Juppé et Bruno Le Maire ont affiché très tôt leur ambition et annoncé leur participation à la primaire de la droite et du centre. Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen seront, eux, directement candidats à la présidentielle de 2017. Face à eux, d'autres attendent encore et laissent planer le doute.
C'est le cas de Nicolas Sarkozy qui se concentre sur sa mission de rassembleur au sein du parti. Même constat au sein de la majorité, où François Hollande ne commente pas la tenue d’une primaire à gauche et conditionne sa candidature à l’inversion de la courbe du chômage. Si les deux hommes laissent planer le doute, c'est avant tout parce que l'annonce de leur candidature est un enjeu crucial qui s'inscrit dans une stratégie très millimétrée, en vue du scrutin. En fonction de sa place sur l’échiquier politique, quel est donc le bon timing ?
À droite, huit candidats se sont déjà déclarés officiellement à la primaire qui aura lieu les 20 et 27 novembre 2016. Sur le plateau du journal de France 2, Jean-François Copé a commencé son marathon médiatique et annoncé sa candidature. L’ancien président de l’UMP explique que ses 18 mois d'absence lui ont laissé le temps de réfléchir à un programme fondé sur une "obligation de résultats". Le timing est-il le bon ? Selon Bruno Cautrès, chercheur au CNRS et au Cevipof joint par RTL.fr, "en annonçant sa candidature trop tôt, Jean-François Copé court le risque de s’essouffler durant la campagne".
Afin d’éviter cet obstacle, il est donc important pour
l’ancien président de l’UMP d’établir des propositions de fond, qui se
démarquent de Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, l’objectif étant de convaincre les électeurs sur la durée. Jean-François Copé pâtit également de sa position idéologique. "Nicolas
Sarkozy a déjà préempté le créneau du candidat droitier, le même que celui du
maire de Meaux", explique Bruno Cautrès.
Ainsi, Jean-François Copé fait-il partie de la catégorie des "outsiders", qui regroupe Nadine Morano, Hervé Mariton ou encore Nathalie Kosciuko-Morizet. L’ancienne vice-présidente des Républicains ne s'est toujours pas déclarée officiellement. Le moment du lancement de leur candidature est donc crucial et cette décision peut s'avérer "périlleuse", selon Bruno Cautrès, car ils ne pourront pas bénéficier éternellement d’un vote contre le président des Républicains.
Chez les gros candidats, Bruno Le Maire a officialisé sa candidature mardi 23 février et se trouve dans une position confortable pour le scrutin. Il s'est installé "solidement dans la position de challenger et veut incarner le renouveau à droite", après son score honorable (29%) lors de l'élection pour la présidence du parti. Il n’était pas lié à des contraintes particulières concernant l’annonce de sa candidature. Il est déjà bien connu des militants et des partisans de la droite et du centre.
Dans le cas d'Alain Juppé, le chercheur au CNRS rappelle
que l'ancien premier ministre est considéré comme "le fils spirituel de
Jacques Chirac". Bénéficiant de son statut d’ancien premier ministre et de maire
d’une grande ville, il ne restait plus qu’à peaufiner et rajeunir son image.
D’où la nécessité de ne pas attendre pour lancer sa campagne : "Il avait
besoin de temps pour affiner sa communication en présentant progressivement ses propositions", explique-t-il. Cela lui permet notamment de se servir de la
sortie de ses livres, comme d’"un marqueur stratégique" afin de communiquer sur son programme. Est-ce que sa popularité dans les sondages se
transformera en vote lors de la primaire ? "Il y aura forcément une
décote mais, pour l'instant, il suit la bonne stratégie parce qu'il empêche
Nicolas Sarkozy de monopoliser le terrain comme son statut d’ancien président et de chef des Républicains aurait pu lui permettre de le faire. Alain Juppé raconte une histoire aux
Français et cela compte pour l’élection présidentielle", analyse Bruno Cautrès.
Pour François Fillon, la situation est différente. "Il a été cinq ans le premier ministre de Nicolas Sarkozy et il veut à présent exister contre son ancien président, c’est une situation très délicate et compliquée à expliquer aux électeurs", estime l'expert. Le chercheur au CNRS note également que le point fort de Nicolas Sarkozy est à la fois son point faible : "Il tient le parti. Mais s'il est candidat, il devra se mettre en retrait des Républicains. Il ne peut le faire que s'il a mis en place auparavant un maillage assez fort pour préparer la primaire".
François Hollande se trouve dans une
situation similaire à celle de Nicolas Sarkozy. Le président de la République a conditionné, pour la quatrième fois depuis le début de son mandat, sa candidature à
l’inversion de la baisse du chômage. "Je me suis engagé personnellement.
J'ai dit que je serai jugé sur cette question-là. Je ne me déroberai pas. Je
n'ai de ce point de vue-là qu'une seule parole. J'ai été candidat pour que nous
créions les conditions pour qu'il y ait une baisse du chômage et il doit y
avoir une baisse du chômage. Et s'il n'y a pas de baisse du chômage, vous savez
quelles conclusions j'en tirerai", expliquait-il sur France Inter, vendredi 19 février.
Le président de la République laisse donc encore planer
le doute sur sa candidature, au grand désarroi de certaines pointures de
gauche qui ont lancé l’idée d’une primaire à gauche. Jean-Christophe
Cambadélis, le premier secrétaire du Parti socialiste, évoque un scrutin "en décembre ou en janvier".
La "période folle qu’a connue François Hollande à un moment donné, humilié par
le livre de Valérie Trierweiler, est désormais lointaine, note Bruno Cautrès.
Maintenant, il ne peut assurer sa réélection que s'il obtient des résultats sur
le plan économique. Plus il se déclare tard, plus il tue dans l'œuf la primaire
à gauche à laquelle il ne pourra peut-être pas échapper". Cependant, il ne peut pas attendre indéfiniment : "Si on n'a
toujours pas eu de bonnes nouvelles économiques, cela va être très compliqué. Si
l'inversion de la courbe du chômage arrive tard, les détracteurs diront que
c'est temporaire". Il se retrouve ainsi dans la même situation que son
prédécesseur : que ferait-il dans un deuxième mandat qu'il n'a pas
fait dans le premier ?
Un autre candidat a choisi de prendre les devants afin de
dynamiter la primaire à gauche. Jean-Luc Mélenchon s'est prêté au jeu en annonçant sa candidature sur le plateau du journal télévisé de TF1. "Les choses bougent à la gauche du Parti socialiste. Il a voulu se déclarer avant de se faire happer par une candidature EELV ou d’autres candidatures à la gauche du PS", explique Bruno Cautrès. En effet, les écologistes ont fait un retour en force lors du remaniement du gouvernement de
Manuel Valls et sont désormais sur le devant de la scène.
Autre point : "Sa candidature rend plus difficile l’organisation de la primaire à gauche". Ni trop tôt, ni trop tard, le député européen a
choisi son moment pour afficher ses ambitions politiques. C’est donc un pari qui peut réussir, selon l’expert, qui ajoute que cela lui permet de "marquer son
territoire" de façon claire et assumée. Tout dépendra aussi de l’organisation ou non d’une primaire à gauche.
Candidate de taille pour la présidentielle de 2017, Marine Le Pen a déjà officialisé sa décision. "Elle est candidate depuis
2012. Personne n'en doute, elle est dans une dynamique ascensionnelle. Elle n'a pas même pas besoin de le dire officiellement tant les militants et sympathisants FN soutiennent sa candidature".
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