Gérald Darmanin, trop fort et très faible
ÉDITO - Le ministre de l'Intérieur passera-t-il Noël place Beauvau ? Son projet de loi "sécurité globale" et les récents actes de violences commis par des policiers mettent son poste en péril.

Entre les violences policières et le projet de loi "sécurité globale", Gérald Darmanin est sous le feu des critiques. On en vient même à se demander si ses jours sont comptés au ministère de l’intérieur. Il ne faut pas se tromper, Gérald Darmanin a été choisi comme ministre de l’Intérieur pour renforcer la stature régalienne d’Emmanuel Macron, une faiblesse identifiée. Et pour retisser un lien avec la police abimé par ses prédécesseurs au ministère de l’Intérieur. Ce qu’il a fait, dans des débuts tonitruants.
En fin politique, il a manié ce qu’il fallait de provocations pour aller chercher la gauche, embarrasser les Républicains, son ancienne famille politique, et rétablir la confiance avec les syndicats de police. Ce qui lui a fait dire cet été "Quand j’entends le mot violences policières, moi personnellement, je m’étouffe". Or, tout ça se retourne contre lui aussi rapidement que ses débuts ont été flamboyants. "N’est pas Nicolas Sarkozy qui veut", m’a glissé hier un ancien ministre de droite.
Le ministre de l’Intérieur part d’un postulat simple, les Français sont en demande de sécurité. Ce qui est vrai dans une période troublée comme la nôtre. Toutes ses décisions de fermeté seront donc soutenues, voilà son pari. Les débats sur les libertés, sur les violences policières, sont donc à ses yeux des polémiques des beaux quartiers parisiens. Ce n’est pas totalement faux. Mais les violences, le passage à tabac, que nous avons vus hier, ne sont généralement pas subis dans les beaux quartiers. Les réactions de footballeurs champions du monde, et une vidéo vues plus de 6 millions de fois, en témoignent.
Dépassé par les évènements
Tout cela dépasse désormais la seule classe politique. La deuxième erreur de Gérald Darmanin a été de répondre, sans discernement, aux demandes des syndicats de police. "Il est dans leurs mains", m’a confié un ancien ami d’Emmanuel Macron. Jusqu’à relayer cette promesse du chef de l’État, empêcher la diffusion d’images d’intervention avec un but malveillant dans la fameuse loi "sécurité globale".
Le gouvernement s’est lancé dans des pirouettes pour s’en sortir. Première pirouette, deux jours après le vote de la loi sécurité globale, son article controversé va être réécrit par une "commission" d’ici Noël. Une issue de secours fabriquée de toutes pièces par Gérald Darmanin et qu’Emmanuel Macron a validée.
Pour les violences, Gérald Darmanin estime qu’il s’agit d’éléments isolés, qui salissent l’uniforme et rien d’autre. La hiérarchie policière ne sera pas inquiétée, il n’y aura pas de débat. Enfin, pour rassurer une majorité un peu chamboulée, Gérald Darmanin ira s’expliquer en début de semaine prochaine devant la commission des lois puis devant le groupe des députés En Marche. Ces pirouettes vont temporiser, elles doivent apaiser, c’est leur but. Si ces pirouettes suffisent, Gérald Darmanin passera Noël place Beauvau.