Affaire Joël Le Scouarnec : "Ma mère s'est sentie coupable de ne pas avoir vu", confie Gabriel, une victime du chirurgien

Le 24 février 2025 à Vannes (Morbihan), un procès hors norme s'ouvre : celui de Joël Le Scouarnec, chirurgien retraité. L'homme de 74 ans, accusé de pédocriminalité, est suspecté d'avoir causé pas moins de 299 victimes de viols et agressions sexuelles, âgées de 11 ans en moyenne au moment des faits. Pendant plus de 30 ans, l'homme à la blouse blanche a sévi auprès de jeunes enfants, des années 80 à 2010, sans jamais être inquiété.

Le 2 mai 2017, les enquêteurs perquisitionnent le domicile du chirurgien à Jonzac (Charente-Maritime) et découvrent des supports numériques au contenu à caractère pédopornographique, ainsi que des carnets manuscrits dans lesquels, il consignait ses actes et envies pédocriminelles.

Derrière ce criminel au crâne dégarni et aux fines lunettes, se cache également un homme décrit comme "discret" selon ses proches, qui adopte un comportement impassible lors du procès. Le 28 mai 2025, il est condamné à 20 ans de réclusion criminelle, dont deux tiers de peine de sûreté.

La plupart de ses victimes sont des enfants abusés dans des chambres d'hôpitaux. Gabriel Trouvé en a fait les frais dès l'âge de cinq ans. Une nouvelle qu'il a eu du mal à confier à sa mère, en 2018. "Quand elle a appris, elle a très mal réagi", confie Gabriel Trouvé dans Les Voix du crime.

Je leur ai dit : 'il faut que je réussisse mes études, c'est hyper important. Je ne peux pas laisser cet évènement de vie gâcher cette reconstruction.'

Gabriel Trouvé, victime de Joël Le Scouarnec

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C'est à la gendarmerie de Rennes, à proximité de son domicile, que Gabriel, 27 ans à l'époque, découvre la sordide nouvelle. Décontenancé, le jeune homme est rejoint par une amie proche au bureau de gendarmerie. Au bout de quelques heures, il prend son courage à deux mains afin de tout raconter à sa mère Christine au téléphone.

"J'ai dû commencer par : 'est-ce que tu peux t'asseoir ?', je suis vraiment désolé, mais ça ne va pas être une bonne nouvelle", confie Gabriel Trouvé. Peu à peu, le jeune homme approche le sujet. "Est-ce que tu te souviens de ce qui s'est passé en 1996 ? Si je te dis que j'ai été opéré ?", commence-t-il. 

Puis il annonce la nouvelle. "Elle a très mal réagi, explique Gabriel Trouvé. Elle s'est sentie coupable de ne pas avoir vu, et trahie de l'abus de confiance et de la position qui était celle de Joël Le Scouarnec à cette époque, et de tous les épisodes de vie qui lui sont revenus au moment où je lui ai annoncé." Ensemble Gabriel et sa mère remonte le fil : des épisodes leur reviennent en mémoire. Surtout de son côté, à elle.

Si mes parents n'avaient pas été là, je n'aurais pas été à ce procès

Gabriel Trouvé

"C'était un peu la pièce qui me manquait au puzzle pour comprendre pourquoi je n'arrivais jamais à aller totalement de l'avant, conclut Gabriel Trouvé. Elle, elle a vu tous ces épisodes-là et elle me les a dit au téléphone." Sa mère s'interroge, désespérée. "Comment je n'ai pas pu le voir ? Comment on n'a pas pu le voir ?"

Dans le déni, ce dernier souhaite que ses parents s'occupent des démarches afin de déposer plainte. "Ce sont eux qui ont tout géré de A à Z. Je leur ai dit : 'il faut que je réussisse mes études, c'est hyper important. Je ne peux pas laisser cet évènement de vie gâcher cette reconstruction', se souvient Gabriel Trouvé. Si mes parents n'avaient pas été là, je n'aurais pas été à ce procès". 

Finalement, le jeune homme s'y est rendu et a formé avec une cinquantaine d'autres victimes, le collectif de victimes de Joël Le Scouarnec pour mettre fin à l'omerta qui a entouré le procès sur les violences faites aux enfants.

 >> Les Voix du crime sont avocats ou avocates, enquêteurs ou enquêtrices, proches de victimes, de suspects ou de coupables. Ces témoins-clefs se confient au micro des journalistes de RTL. Des témoignages inédits, qui apportent un éclairage nouveau sur la justice et les grandes affaires criminelles d’aujourd’hui.


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