Italie : le plus grand pont suspendu au monde va être construit afin de relier la Sicile au continent

Rome a donné son feu vert définitif pour la construction du plus long pont suspendu au monde. Le but est de relier l'île de Sicile au continent pour 13,5 milliards d'euros.

Une vue de la côte en Sicile (illustration).

Crédit : Andreas SOLARO / AFP

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"Ensemble, nous écrivons l'histoire" a déclaré le Vice-Premier ministre et ministre des Infrastructures italien Matteo Salvini. Ce mercredi 6 août, un projet de construction de 13,5 milliards d'euros a été approuvé. La construction du plus long pont suspendu au monde va débuter entre septembre et octobre. L'objectif est de relier la Sicile au continent.

D'après le ministre, "une infrastructure de ce genre représente un accélérateur de développement". Pour l'homme politique, ce projet apportera de la croissance économique et des dizaines de milliers d'emplois à deux régions italiennes pauvres, la Sicile et la Calabre. Le feu vert pour la construction de ce pont marque une "page historique" après des décennies de planification. Financé par l'État, il enjambera le détroit de Messine.

La Première ministre italienne Giorgia Meloni a pour sa part qualifié le projet de "symbole d'ingénierie de portée mondiale". Selon elle, il démontre "la force de volonté et la compétence technique de l'Italie".

Un projet d'une grande ampleur

Le pont sera composé de deux voies ferrées au centre et trois voies de circulation de chaque côté. Il va être conçu avec deux paires de câbles tendus entre deux tours de 400 mètres de haut, avec une portée suspendue de 3.300 mètres. Il s'agit d'un record mondial. Prévu pour être achevé d'ici 2032, le gouvernement affirme qu'il s'agit d'une prouesse technique. La construction sera apparemment capable de résister aux vents violents et aux tremblements de terre. Des éléments essentiels pour une région située à la jonction de deux plaques tectoniques.

Ce plan a suscité des protestations locales pour plusieurs raisons. Premièrement, en raison de son impact environnemental. L'infrastructure sera construite sur une zone marine protégée et pourrait causer "un carnage" de "millions d'oiseaux". En effet, selon Tommaso Castronovo, président d'une association de défense de l'environnement, ce pont va perturber les routes migratoires des volatiles.

Le deuxième élément au cœur des protestations est le prix du projet. Selon ses détracteurs, ces 13,5 milliards d'euros pourraient être mieux utilisés ailleurs. Enfin, nombre d'élus locaux et d'experts redoutent aussi que les mafias locales ne profitent largement de cette manne. Le procureur général de Messine a mis en garde contre le risque d'infiltration de ces dernières dans la construction du pont. Selon lui, son "pouvoir se cache derrière les ouvrages publics".

Pour le ministre Salvini, "ne pas construire ce pont pour ces raisons reviendrait à ne jamais réaliser aucun projet dans ces régions".

Un choix "insensé"

Nicola Fratoianni est le patron du parti de gauche Alleanza Verdi e Sinistra. Opposé au projet, il a déclaré que ce pont est "un choix insensé à tous points de vue". Il affirme que la construction de cette "méga œuvre" va"détourner énormément de ressources publiques qui seraient pourtant nécessaires pour répondre aux problèmes et aux urgences de millions d'Italiens".

Certains opposants au projet pensent aussi qu'il ne verra jamais le jour. Ils rappellent la longue histoire des travaux publics annoncés, financés et jamais achevés en Italie. Le pont lui-même a connu plusieurs faux départs, les premiers plans ayant été élaborés il y a plus de 50 ans.

Eurolink, un consortium dirigé par le groupe italien Webuild, avait remporté l'appel d'offres en 2006. Cependant, celui-ci a été annulé après la crise de la dette dans la zone euro. Le consortium reste tout de même le contractant du projet relancé. Cette fois-ci, Rome a une motivation supplémentaire pour aller de l'avant. En effet, elle a classé le coût du pont comme une dépense de défense.

L'Italie, criblée de dettes, a accepté d'augmenter massivement ses dépenses de défense pour les porter à 5% du PIB. Face à la demande du président américain Donald Trump, d'autres alliés de l'Otan font de même. Sur ce montant, 1,5% peut être consacré à des domaines "liés à la défense", tels que la cybersécurité et les infrastructures. Rome espère que le pont de Messine sera éligible, d'autant plus que la Sicile abrite une base de l'OTAN.