Coronavirus : la Chine "profite de la situation pour pousser ses pions", dit Olivier Bost
ÉDITO - La Chine a été la première puissance touchée par le virus Covid-19 et pourtant, elle pourrait en ressortir largement renforcée. Pourquoi ce paradoxe ?

L’usine du monde, comme on dit, a été très durement frappée par la pandémie et quasiment stoppée. C’est un fait. Mais, sortie officiellement d’affaire, la Chine veut profiter de cette crise pour renforcer son influence mondiale. Et elle le fait au grand jour.
Lorsque les autorités chinoises envoient du matériel médical - des masques, des respirateurs, des médicaments - elle n’oublient jamais de filmer le chargement et le déchargement des cargaisons. Au total, 82 pays reçoivent en ce moment cette aide, la Chine vient au secours du monde.
Je vous donne un autre exemple : l'ambassade de Chine en France depuis quelques semaines est passée à l’offensive dans sa communication. Bien loin de la diplomatie chinoise habituelle, très courtoise. "Certaines personnes envient l’efficacité de notre système politique, répond l’ambassade chinoise sur les réseaux sociaux à ses détracteurs. Ils haïssent l’incapacité de leur propre pays à faire aussi bien…"
Une drôle de promotion de la dictature communiste. Les dirigeants européens en sont réduits à le constater. Le régime chinois profite de la situation pour pousser ses pions.
La Chine a-t-elle vraiment plus d'influence ?
Oui, le désordre mondial, qui ne date pas d’aujourd’hui, leur est favorable. Donald Trump a disqualifié toutes les grandes instances internationales et fustigé la coopération entre les nations. Les États-Unis ne jouent plus les régulateurs et l’Europe est bien trop désordonnée pour le faire.
Le numéro 1 chinois, Xi Jinping, occupe la place. Il s’affiche comme le nouvel animateur du multilatéralisme. C’est lui qui a donné ses conseils, lors du G20 consacré au coronavirus. C’est la Chine qui verse de l’argent à l’OMS, l’Organisation mondiale de la Santé. Au point d’inquiéter notre diplomatie.
Une note d’experts du quai d’Orsay que se sont procuré plusieurs journaux résume très bien les enjeux du moment. Il faut éviter que l’après-crise, écrivent ces experts, "permette l’emprise de la Chine sur la mondialisation et la gouvernance mondiale". Tout est dit.
Que disent les dirigeants européens ?
Il y a quelques voix mais de pas de grosses critiques. En France, des ministres et des conseillers disent que les Chinois nous ont trompés sur l’étendue de l’épidémie, qu’ils sont en grande partie responsable de notre situation et qu’ils mentent sur le bilan humain ou sur la maîtrise de la propagation du virus. Mais ils le disent hors micro.
Ce n’est pas le moment de se fâcher avec la Chine. Nous avons besoin des masques et des médicaments. C’est comme Donald Trump qui parlait du virus chinois pour s’en moquer : désormais il salue l’aide de Pékin. Ce retournement de situation permet au régime communiste de faire oublier que la pandémie est apparue en Chine.
Les dirigeants chinois se transforment en gentils bienfaiteurs pas du tout désintéressés, pile au moment où nous nous interrogeons sur notre dépendance à leur égard. D’abord affaiblis, ils ont fait de la situation une opportunité. Le jour d’après, comme on dit, l’économie chinoise pourrait se relever bien plus vite que les autres et le régime communiste en sortir renforcé. Le virus va aussi bouleverser l’ordre mondial.
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