Les supporters de l'équipe de France font grise mine depuis quelques semaines, alors que le coup d'envoi de la Coupe du Monde n'a jamais été aussi proche. Forfait de N'Golo Kanté, incertitudes concernant Paul Pogba, forfait de Mike Maignan, blessure de Raphaël Varan, blessure de Karim Benzema... La liste des blessés/forfaits donne des sueurs froides aux fans mais sans doute aussi à Didier Deschamps.
Néanmoins, en changeant d'angle de perception et en se mettant dans un prisme étranger, c'est-à-dire celui des rivaux des Bleus, on se rend compte que la France arrivera quand même avec l'étiquette de favori. Et il faudrait une hécatombe extrême d'ici le coup d'envoi contre l'Australie le 22 novembre pour que cela change.
En effet, si nous avons en tant que Français un œil immergé, et un sens critique culturel, on peut manquer parfois de recul et il serait temps de faire un pas de côté pour sortir de notre prisme, et tenter de voir la situation sous un autre angle, et dans son ensemble.
Premièrement, balayons les constats évidents : oui, la France serait moins forte sans Kanté, sans Pogba ou sans Varane. Mais elle serait moins forte s'ils sont présents mais sans être à 100%. Car la puissance des Bleus, notamment physique, trouve sa source d'une supériorité athlétique ou du moins d'une condition athlétique optimale. Est-ce que Pogba sera à son meilleur niveau s'il est rétabli ? Non. Faudra-t-il quand même le sélectionner en espérant une montée en puissance durant la compétition ? Didier Deschamps jugera sur pièce, et en prenant en compte la place du Turinois dans le vestiaire de l'équipe de France. Car rappelons qu'il n'y aura pas le traditionnel mois de préparation qui permettait un "reboot" des joueurs.
De plus, depuis 2018 on a rarement vu tous ces cadres à l'heure niveau optimal. Blessures, baisses de forme, changement de club peu judicieux, cela fait bien longtemps que les cadors d'antan ne l'ont pas été. Pour le moment, le constat est alarmant, mais rappelons-nous qu'il faut sortir de notre prisme franco-français. Et à l'étranger, on voit les rencontres de Varane, Kanté, Pogba and co dans leurs (grands) clubs. Les joueurs de l'équipe de France sont très exposés car évoluant dans les top-clubs étrangers. Des équipes d'élite où d'autres tricolores évoluent.
Ainsi, en défense, quand un Allemand voit Varane blessé, il se dit que Lucas Hernandez ou Benjamin Pavard pourraient très bien venir jouer les remplaçants de luxe. Un Anglais verrait en William Saliba, brillant avec un Arsenal leader de Premier Leader un joker crédible. Il en va de même pour Wesley Fofana de Chelsea (bien que de retour de blessure). En Espagne, la cote d'un Jules Koundé est très haute et son arrivée au Barça ne fait que renforcer l'idée qu'il est un joueur à gros potentiel. En Italie, Pierre Kalulu enchaîne les saisons solides et a été un cadre du champion d'Italie en titre, alors qu'il n'a pas été encore appelé en bleu. Et on n'oublie pas le champion du monde Kimpembe revenu avec le PSG. Une litanie de noms qui souligne que pour les autres, le réservoir des Bleus est effrayant.
Au milieu, il y a sans doute une exception : l'absence de Kanté est impossible à combler. Aucun autre joueur n'a son profil. Mais pour autant, on ne verra pas un fan étranger pleurer les Bleus qui aligneraient Tchouaméni, Rabiot, Pogba (s'il est prêt), Guendouzi, Fofana ou Camavinga. Certes il n'y a rien de clinquant mais le réservoir est là encore impressionnant. Toujours avec un postulat de départ : Kanté n'est pas remplaçable dans son profil unique.
Enfin, comment faire croire à un interlocuteur étranger que la France pourrait s'inquiéter de l'absence - encore très hypothétique - de Benzema, blessé actuellement mais sans risque à cette heure sur sa participation à la Coupe du Monde ? En effet, qui peut se targuer de pouvoir aligne Mbappé, Griezmann, Giroud, Dembélé, Nkunku, Diaby, Coman ou même Thuram ? Pas grand monde.
Surtout, on oublie que les autres nations aussi tremblent de voir leurs joueurs souffrir de blessures avant le début des matchs au Qatar. Aucune ne semble pouvoir s'épargner des absents du groupe habituel. L'Angleterre ne pourra pas compter sur Reece James, parmi les meilleurs latéraux du monde, et Kyle Walker est incertain. Les Néerlandais feront sans leur capitaine Georginio Wijnaldum et les Portugais sans Diogo Jota, et avec un Ronaldo en manque de compétition étant donné sa situation à Manchester United. Le Brésil quant à lui se demande si Paqueta et Richarlison seront remis de sa blessure à l'épaule. En bref, le mantra d'un supporter des Bleus pourrait être : "Quand je me contemple je me désole, quand je me compare je me console".