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ÉDITO - Indexer les salaires sur l'inflation, bonne ou mauvaise idée?

François Ruffin, député LFI, a proposé la réindexation des salaires sur les prix. Cette méthode, qui n'est plus utilisée en France depuis 1983, a-t-elle du sens ?

L'inflation (illustration)
L'inflation (illustration)
Crédit : AFP / JOEL SAGET
Indexer les salaires sur l'inflation, bonne ou mauvaise idée?
00:03:45
Indexer les salaires sur l'inflation, bonne ou mauvaise idée?
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François Lenglet - édité par Philippine Rouvière Flamand

L'indexation des salaires, c'est le fait d'augmenter automatiquement les rémunérations par rapport aux prix. C'était la méthode utilisée en France jusqu'en 1983. Cela aurait l’avantage de protéger les salariés français contre la perte de pouvoir d’achat causée par une inflation qui, nous dit l’INSEE, pourrait atteindre 7% en fin d’année.
 
Mais si la France a arrêté de le faire en 1983, c'est parce qu’on pensait que ce mécanisme était en lui-même inflationniste. Il était supposé lutter contre les effets de la hausse des prix, alors qu’il amplifiait cette hausse, dans la fameuse spirale prix-salaire. Pour la France socialiste de 1983, qui venait de décider du tournant de la rigueur, ce blocage des salaires était aussi un instrument pour rétablir la compétitivité.

Cette dernière avait été détériorée par les deux premières années du mandat Mitterrand. Il ne faut pas oublier que cette désindexation intervient après la semaine de 39 heures, la cinquième semaine de congés payés et l’augmentation de 10% du Smic. Sans oublier la retraite à 60 ans. Ça relativise la baisse de pouvoir d’achat de l’époque.

L'indexation des salaires veut-elle dire perte de compétitivité ?

Le risque en indexant les salaires, c'est la perte de compétitivité. En renchérissant les coûts des entreprises, on freine mécaniquement leurs possibilités de vendre. En allégeant la charge des salariés, on alourdit celle des entreprises. Alors, en général, elles se vengent en quelque sorte, en supprimant des emplois : elles remplacent les hommes par des machines, pour retrouver leur rentabilité. Ou bien elles délocalisent. Ça peut donc créer du chômage.
 
Ce n'est pas non plus forcément une mauvaise idée. Poser la question de l’indexation, c’est se demander qui doit payer pour l’inflation. Car indexer, c’est faire payer les entreprises. Et ne pas le faire, c’est taxer les salariés.

Cette question est de plus en plus légitime, à mesure que les prix montent et que l’inflation dure. Tant que ce n’était qu’un ressaut, on pouvait estimer que les hausses de salaire n’étaient pas nécessaires, surtout avec l’intervention de l’État, le troisième partenaire dans cette affaire, qui a pris en charge une partie du coût avec son bouclier tarifaire sur l’énergie. 

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Si l’inflation persiste sans hausse de salaire, nous basculerons dans le risque social, les conflits, les grèves, la précarité. Ce qui n’est pas mieux que le risque inverse. De plus, avec un marché du travail tendu comme aujourd’hui, les salariés seront tentés d’aller chercher les augmentations ailleurs, chez les concurrents. C’est ce qui se passe aux États-Unis, où presque deux tiers de ceux qui changent d'emplois obtiennent une hausse à deux chiffres. Ça déstabilise les entreprises. 
 
La bonne solution serait de réévaluer les salaires à l’échelle européenne, pour neutraliser la perte de compétitivité, au moins dans la zone euro. Ce choc de l’inflation, qu’on appelle "symétrique", tous les pays européens le subissent en même temps et de la même façon. Ça devrait permettre une réponse commune. 

Surtout que quatre pays qui disposent déjà de mécanisme d’indexation, la Belgique, le Luxembourg, l’Espagne et Chypre. Le système belge est particulièrement intéressant. Parce qu’il cale l’évolution des salaires sur ce qu’on appelle là-bas l’indice santé, c’est-à-dire la hausse des prix des produits dont on a exclu le tabac et l’alcool. Et il y a aussi en contrepartie un frein temporaire qu’on peut actionner en cas de compétitivité détériorée. Charles Michel, ancien premier ministre, l’avait utilisé de 2015 à 2018.

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