Un de nos auditeurs, Boris, m’a demandé, sur langue@rtl.fr, de réparer une injustice. Boris
m’écrit qu’il "aime beaucoup la ponctuation, dont l’importance est très
injustement sous-estimée." Et je suis bien d’accord avec lui : ce
n’est pas parce que les signes de ponctuation sont petits qu’ils ne sont pas
super costauds.
La ponctuation est un code, explique l’un des
papes français de la question, Jacques Drillon. "Tous les signes de
ponctuation sont des raccourcis", des ellipses. "Dans une
énumération, au lieu de dire et…, et…, et…, on a réduit la
coordination à un petit signe, une virgule. Quand la virgule d’une énumération
est posée entre deux termes, le lecteur sait qu’il faut penser et.
(…) Il en va de même des autres signes. Un guillemet signifie : je
cite (…). Descartes aurait pu écrire son cogito "Je pense : je
suis." Car le deux-points signifie "donc" - entre
autres !
Et bien entendu, on ne saurait aujourd’hui se passer
de ponctuation. La preuve ?
Si je dis : "Muriel dit cette chronique est idiote". Sans
ponctuation dans la phrase, difficile de décider ce que cela signifie. On peut
comprendre : "Muriel dit : 'Cette chronique est
idiote.'" ou "Muriel, dit cette chronique, est idiote." Les deux versions sont correctes, seulement dans l’une
la chronique est idiote, dans l’autre c’est moi qui le suis. Un autre exemple, bien connu. La phrase : "Venez
manger les enfants !" Si vous ne mettez pas de virgule après manger,
ce sont les enfants qui sont au menu. Bref, si la ponctuation n’existait pas,
il faudrait l’inventer.
D’ailleurs, qui l’a inventée ? On ne sait pas
trop, mais elle n’a pas toujours existé, loin de là. Le blanc même entre les mots, quinoussemblesinatureletsanslequellalecturedunephrase
écritenousestdevenuequasimentimpossible,
est une invention géniale qui ne s’est vraiment répandue dans les manuscrits qu’à partir du VIIème siècle.
Auparavant, les mots étaient collés les uns aux autres, comme si c’était un seul et même mot du début à la fin du texte !
Vous imaginez ? Les premières traces de ponctuation, quant à elles,
remonteraient selon certains aux dramaturges de la Grèce antique, qui
cherchaient par des signes à indiquer aux comédiens les moments où respirer en
déclamant leurs textes.
Selon d’autres, l’idée serait venue aux lettrés de la bibliothèque d’Alexandrie, entre le IIIème et le IIème siècle
avant notre ère. Mais quoi qu’il en soit, les signes de ponctuation ne se sont
vraiment installés en France qu’au XVIème siècle, avec l’imprimerie, ce qui est finalement plutôt récent.
Nous verrons demain que les grandes règles qui
régissent la ponctuation ne sont pas si rigides que certains le craignent
parfois.
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