Le 14 mai 2024, un peu avant 11 heures, le fourgon pénitentiaire qui ramène Mohamed Amra, narcotrafiquant de 30 ans, à la prison d'Évreux après une audition au tribunal de Rouen est attaqué par un commando armé au péage d'Incarville (Eure). Deux surveillants, Fabrice Moello, 52 ans, et Arnaud Garcia, 34 ans, sont abattus, criblés de balles. Trois autres sont gravement blessés. Le commando extrait le détenu du fourgon, prend la fuite et disparaît dans la nature. Des tirs à l'arme de guerre et une opération méthodique.
Mohamed Amra, surnommé "La Mouche" par ses proches, devient dès lors l'homme le plus recherché du pays. Christian Sainte, directeur national de la police judiciaire parisienne, raconte pour la première fois l'intégralité de la traque du narcotrafiquant et de ses complices qui débute juste après l'attaque sanglante d'Incarville, au moment où les premiers rapports arrivent sur son bureau.
Christian Sainte se remémore très bien ce moment. "Il y a quand même un effet global de surprise, de choc. (...) Pourquoi ? Parce que c'est la première fois qu'on a une attaque de ce niveau de violence, organisée de cette manière-là pour faire évader un détenu", raconte Christian Sainte, dans Les Voix du crime.
On se rapprochait de lui, à la fois géographiquement et dans le temps. On n'était pas loin de lui mettre la main dessus.
Christian Sainte, directeur national de la police judiciaire parisienne
Très vite, les enquêteurs disposent d'indices décisifs. Dès le jour de l'attaque, un témoignage crucial arrive à la PJ : une personne dit avoir remarqué deux individus suspects , à la terrasse d'un café, guettant la sortie du tribunal de Rouen le matin de l'évasion. Le témoin a même la présence d'esprtit de mettre de côté la bouteille de jus de fruit consommée par un des deux hommes. "Cela nous avait permis de récupérer du matériel, des empreintes en particulier, qui nous ont mis sur la piste d'un premier suspect", raconte Christian Sainte.
Assez rapidement aussi, les enquêteurs vont découvrir l'étendu du réseau qui a participé ou de la loin à la cavale de la Mouche. En plus des cinq membres présumés du commando, "apparaît une toile d'araignée qui en réalité révèle toute une communauté d'individus extrêmement soudés, extrêmement proches, et très sincèrement on n'imaginait pas avoir autant de cibles à travailler" se souvient Christian Sainte, "on a quand même plus de 70 personnes qui ont été prises en compte par les enquêteurs".
La téléphonie et les connections numériques du narcotrafiquant et de ses complices vont être au cœur des investigations. Les policiers mettent un nombre record de gens sur écoute et sous surveillance cyber. Un record de 230 millions de traces numériques, lignes téléphoniques, adresses IP, numéros de boitiers téléphoniques, de box wifi ou de routeurs sont analysés, un record. Derrière leur démarche, les deux priorités des enquêteurs sont claires : localiser Mohamed Amra et identifier les complices qui lui ont permis de s'évader. "Ces deux aspects du dossier sont aussi importants l'un que l'autre", estime Christian Sainte. Le tout, dans le plus grand secret, pour éviter la fuite des individus identifiés.
Le point de bascule intervient à l'automne 2024 quand les enquêteurs arrivent à isoler un téléphone dont tout indique qu'il est relié à Mohamed Amra. Au même moment, à partir de l'interpellation d'un des suspects dans une autre affaire complètement décorrélé de l'évasion, les enquêteurs parviennent à mettre la main sur une planque du narcotrafiquant, située à Compiègne (Oise), occupée pendant plusieurs mois. "Avec cette planque, cela nous a indiqué qu'Amra n'était pas parti très loin, qu'il faisait une cavale 'low cost' (...). Dans la dynamique de ce qu'on avait acquis comme information, on a pu déterminer qu'il avait changé de ville pour se planquer. On se rapprochait de lui, à la fois géographiquement et dans le temps. On n'était pas loin de lui mettre la main dessus", se souvient Christian Sainte.
On n'imaginait pas l'ampleur de l'organisation qu'il y avait derrière, et surtout l'ampleur des investigations.
Christian Sainte, directeur national de la police judiciaire parisienne
L'appareil numérique et les lignes associées, au champ actif de plus en plus réduit, borne d'abord à Rouen (Seine-Maritime). Alors que la PJ resserre ses filets, une nuit, les enquêteurs voient le téléphone se déplacer vers l'est de l'Europe, en Roumanie, et enfin, à Bucarest, la capitale du pays.
Le 22 février 2025, en début d'après-midi, les policiers roumains procèdent à l'arrestation d'Amra, à la descente d'un VTC.
"Ça s'est bien passé. C'est une belle victoire, du beau travail, c'est une fierté pour nous d'avoir rempli le contrat. Tout le monde est content de la coopération qui a été parfaite avec les collègues étrangers", sourit Christian Sainte. En parallèle, une grande vague d'interpellations de près de 70 personnes, membres et proches de la "Black Manjak Family", l'organisation criminelle qui a facilité l'évasion de Mohamed Amra, est menée par les enquêteurs.
"Même si on a cinq malfaiteurs qui sont vus en vidéo, on n'imaginait pas, l'ampleur de l'organisation qu'il y avait derrière et surtout de l'ampleur des investigations qu'il faudrait mettre en œuvre, à la fois pour le localiser, mais finalement pour identifier tous ces membres, de toute cette assistance et organisation criminelle", conclut Christian Sainte.
Procès
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