Voilà exactement un an que Carlos Ghosn, le patron de Renault-Nissan, a été arrêté au Japon... Et l'on reste encore stupéfait des chefs d'accusation qui ont été retenus contre lui : la dissimulation de dizaines de millions d'euros de rémunération future, ainsi que l'usage sans contrôle de fonds appartenant à l'entreprise pour des résidences ou pour favoriser ses proches.
Tout cela demande bien sûr à être confirmé par la justice, mais les rapports établis sur ces dérives supposées ont quand même convaincu les administrateurs français, a priori favorables à Carlos Ghosn, de le révoquer il y a quelques mois. La question qui se pose est donc : comment l'un des patrons les plus brillants de sa génération, cador de l'industrie automobile mondiale, a-t-il pu péter les plombs ? C'est une question essentielle qui va bien au-delà du cas Ghosn, parce qu'elle touche au pouvoir dans l'entreprise.
Le pouvoir excessif conduit à la dérive. Pouvoir excessif qui se construit souvent sur une réussite exceptionnelle. Le danger, ce n'est pas le mauvais patron. C'est le très bon patron qui devient mégalomane. Carlos Ghosn a accompli des choses exceptionnelles, en redressant en un temps record Nissan, qui était en faillite. Ce retournement éblouissant a développé autour de lui une sorte de culte, réduisant à néant les critiques ou les opposants. Barack Obama l'a même courtisé pour lui proposer la tête de General Motors avec un salaire considérable.
Et quand la réussite monte à la tête, c'est d'autant plus problématique qu'une entreprise n'est pas une démocratie. Un patron n'est pas élu, il peut donc se comporter en autocrate. On a connu cela aussi avec Jack Welch, l'ancien patron du conglomérat américain General Electric, qui était littéralement adulé par le monde entier, et qui a laissé son entreprise très fragile, après l'avoir formidablement développée.
Le problème, c'est qu'on ne voit pas tout de suite les fragilités, quand il y a un patron star. Les subordonnés corrigent les faits, dénaturent la réalité, pour la rendre conforme aux souhaits du patron, par crainte de se faire avoiner. Je me souviens que Peter Drucker, un gourou californien du management, m'avait dit que pour faire le bilan d'un dirigeant, il fallait attendre deux ans après son départ, justement pour pouvoir ouvrir les placards. Et juger son successeur. C'est le défaut de ces patrons hors pair et vaniteux, ils se choisissent toujours des successeurs qui ne sont pas à la hauteur. Par crainte de la concurrence, ou parce qu'au fond, ils ne veulent pas décrocher. Alors qu'un vrai grand patron organise sa succession en prenant le meilleur. C'est ce qu'avait fait Louis Schweitzer, justement en prenant Ghosn.
Pour protéger l'entreprise de ces dérives, on peut installer des contre-pouvoirs. Le conseil d'administration en est un, qui doit pouvoir s'opposer au patron. Ça n'a pas été le cas chez Renault. Et chez Nissan, c'est intervenu trop tard, de façon brutale, en organisant le guet-apens à l'aéroport de Tokyo où Ghosn a été arrêté. Le Financial Times suggère une autre mesure de prévention : borner la durée d'un patron à huit ans, quoi qu'il arrive. Au-delà de ce mandat, nous dit le journal britannique, les risques de sortie de route sont multipliés.
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