La Nouvelle Vague fait ses adieux à son réalisateur emblématique : Jean-Luc Godard est décédé à l'âge de 91 ans, a indiqué sa famille dans un communiqué ce mardi 13 septembre. Il est mort "paisiblement" à son domicile situé dans la petite commune de Rolle en Suisse.
Né le 3 décembre 1930 à Paris, le cinéaste franco-suisse a vécu par et pour le cinéma. Il en a épousé les tous les contours, tous les formats et occupé tous les postes : journaliste critique à ses débuts puis auteur, réalisateur, producteur, monteur et même parfois acteur de ses films.
Sur Twitter, le président de la République Emmanuel Macron a salué un "maître" du cinma français. "Jean-Luc Godard, le plus iconoclaste des cinéastes de la Nouvelle Vague, avait inventé un art résolument moderne, intensément libre. Nous perdons un trésor national, un regard de génie", a-t-il déclaré.
En 1960, Jean-Luc Godard aux côtés de Truffaut, Chabrol, Rohmer ou Rivette il a inventé, imaginé une autre façon de faire du cinéma : on a appelé ça "la Nouvelle Vague" et ça a tout changé. Dans la foulée d'À bout de souffle avec Jean Seberg et Jean-Paul Belmondo, Godard brise les codes et applique une règle qui le suivra jusqu’au bout : ne jamais être là où on l’attend. Sur le tournage de Petit soldat en 1963, il rencontre celle qui va marquer sa vie et sa carrière : Anna Karina.
En 1964, sa caméra croise LE sex-symbol absolu, l'incarnation de la féminité et de la liberté : Brigitte Bardot, associée à Michel Piccoli dans Le Mépris. Le tournant des années 68 signe la fin de l'âge d'or du cinéaste qui poursuit sa carrière avec Sauve qui peut la vie, une série de 7 films avec Isabelle Huppert, pamphlet cruel sur une société qui broie ses citoyens. C'est une boulimie qui le remet au cœur de la planète cinéma et fait à nouveau de lui un réalisateur emblématique, dont chaque long-métrage est attendu comme un événement.
Sauve qui peut la vie est le premier d’une série de 7 films que Godard tourne en 7 ans. Une boulimie qui le remet au cœur de la planète cinéma et fait à nouveau de lui un réalisateur emblématique, dont chaque long-métrage est attendu comme un événement. C’est le cas de Détective en 1985, vrai-faux polar sentimental dans lequel on croise Johnny Hallyday, Nathalie Baye ou Claude Brasseur...
Les films suivants apparaissent décousus et le public comme la critique en perdent le fil. Vient alors le dernier mouvement de son œuvre, une plongée dans les méandres de la construction d’un film qui, dans son cas, passe à l’écran par une déconstruction de la forme même d’un film. Histoire(s) du cinéma, Éloge de l’amour, Vrai-faux passeport, Godard expérimente plus qu’il ne filme, délaissant les règles de la narration, du jeu et du montage... Objets fascinants et déroutants, ces projets sont à voir comme des œuvres d’art modernes, comme Adieu au langage en 2014.
Le réalisateur déclarant que ses films ne sont plus, pour lui, du tout adaptés à une salle obscure mais plutôt à des musées, où certains des derniers seront uniquement diffusés... Jean-Luc Godard est désormais un ermite, il ne quitte plus sa caverne suisse. Quand le Festival de Cannes lui décerne une palme d’honneur spéciale en 2018, c’est par téléphone portable qu’il s’exprime, estimant qu’il n’a plus à venir sur la Croisette puisqu’il l’a déjà fait.
Avec le temps, Godard est devenu un objet de la culture populaire auquel Michel Hazanavicius a consacré un film, Le Redoutable en 2017. Une icône polémique, adulée par des fans irréductibles. Certains diront un gourou protégé par une secte. Son œuvre doit être vue comme le reflet parfois daté de son époque mais, qu’on l’apprécie ou pas, elle aura changé le cinéma et c’est déjà beaucoup.