C'est un cas de figure inédit. Pour la première fois depuis que l'humanité calcule leurs trajectoires, un astéroïde découvert à proximité de la Terre a une probabilité supérieure à 1% de frapper notre planète dans les prochaines années. Une chance sur 76, selon l'Agence spatiale européenne (ESA), et une chance sur 77, selon la Nasa. La collision pourrait survenir en décembre 2032.
Repéré le 27 décembre dernier par l'observatoire de Rio Hurtado, au Chili, l'astéroïde 2024 YR4 se trouve actuellement à une distance supérieure à plus de deux fois celle qui sépare la Terre et la Lune. Il est désormais placé sous haute surveillance par les agences spatiales, les télescopes et les systèmes automatiques d'alerte du monde entier.
C'est la première fois qu'un astéroïde dépasse le seuil des 1% depuis qu'a été mis en place le Réseau international d'alerte des astéroïdes sous l'égide des Nations Unies en 2013". "Il fait partie des astéroïdes qui croisent la trajectoire de la Terre, dont la plupart viennent de la région entre Mars et Jupiter. C'est un objet très petit. Il aurait une taille comprise entre 50 et 100 mètres. On a trouvé une probabilité d'impact sur la base des connaissances actuelles de l'ordre de 1,3% pour le 1er décembre 2032", confirme à RTL Patrick Michel, directeur de recherche au CNRS et astrophysicien à l'observatoire de la Côte-d'Azur.
L'astéroïde est classé à ce stade au niveau 3 de l'échelle des risques d'impact Turin, conçue par l'agence spatiale américaine en 1999, qui s'échelonne de zéro à dix. Il a également une valeur élevée sur l'échelle de Palerme. Ces classements impliquent une attention accrue des astronomes et l'organisation de nouvelles observations pour reclasser le risque. Pour l'instant, la trajectoire du géocroiseur est très incertaine. La communauté internationale va multiplier les observations dans les prochaines semaines pour affiner ses estimations.
"2024 YR4 est observable jusqu'au mois d'avril. Cela signifie que demain, après-demain ou dans les semaines qui viennent, on pourrait complètement annuler la probabilité d'un impact. On met tous les moyens à notre disposition pour affiner au maximum sa trajectoire. On a même sollicité le télescope spatial James Webb. En revanche, si on reste avec une probabilité non nulle au mois d'avril, il faudra vivre avec cette possibilité jusqu'en 2028, quand 2024 YR4 sera à nouveau suffisamment proche de la Terre pour être observé", explique Patrick Michel, également auteur du livre A la rencontre des astéroïdes.
Si le risque est toujours existant à ce stade, la communauté internationale devra décider quelle stratégie mettre en œuvre pour assurer la défense planétaire. Le Groupe consultatif sur la planification des missions spatiales qui rassemble les agences spatiales pourra émettre des recommandations à l'ONU pour envisager la suite des événements.
"Une possibilité pourrait consister à envoyer une mission pour essayer de faire dévier l'astéroïde de sa trajectoire. Mais nous n'aurions que 4 ans pour la préparer", indique Patrick Michel. Un délai qui n'inquiète pas l'expert car les agences spatiales peuvent désormais s'appuyer sur les enseignements des programmes de déviation d'astéroïdes lancés ces dernières années, comme la mission DART de la Nasa en 2021, et la mission HERA de l'Esa l'an dernier.
En cas de collision avec la Terre, les dégâts pourraient être significatifs, à un niveau local, voire régional, selon la taille et la composition de l'astéroïde. "S'il ne fait que 50 mètres, on aurait un impact similaire à ce qu'il s'est passé au sud de la forêt de la Toungouska en Sibérie le 30 juin 1908 quand un objet de cette taille avait explosé dans l'atmosphère", observe Patrick Michel. L'impact avait détruit la forêt sur un rayon d'une vingtaine de kilomètres. Si un objet similaire venait à exploser au-dessus de Paris, toute la capitale y passerait. Si sa taille se situe plutôt aux alentours de 100 mètres, les dégâts se mesuraient alors à l'échelle de la région.
Mais pas question de céder au scénario catastrophe pour autant. "1% de probabilité, ça reste très faible. Ça veut dire qu'il y a 99% de chances pour que ça n'arrive pas", souligne Patrick Michel. Dans la mesure où la Terre est recouverte essentiellement d'eau et de déserts, "il est beaucoup plus probable que l'intrus finisse sa course dans une zone inhabitée", poursuit l'expert. Pour l'heure, la zone d'impact potentielle balaye un large corridor qui s'étend de l'océan Pacifique au nord de l'Inde, en passant par l'Amérique centrale, l'océan Atlantique et l'Afrique centrale.
Si de nombreuses zones d'ombre doivent encore être éclaircies dans les années qui viennent, l'humanité semble préparée à y faire face. Ses capacités de détection seront renforcées cet été par l'entrée en service de l'observatoire Vera Rubin au nord du Chili, qui doit permettre de multiplier par dix le nombre d'objets connus dans notre système solaire. Une mission de la Nasa doit également faire l'inventaire des astéroïdes potentiellement dangereux avec un télescope infrarouge à partir de 2027. "Je me souviens qu'en 2004, on avait découvert que la probabilité d'un impact avec l'astéroïde Apophis était assez élevée pour 2029. On se demandait alors comment s'organiser, qui contacter... Fort heureusement, le risque avait vite été éliminé. La bonne nouvelle, c'est qu'on constate aujourd'hui que la coordination internationale qu'on a mise en place pour faire face à ces menaces est effective et efficace", assure Patrick Michel.
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