Paris n'est pas la France, mais Paris illustre bien, avec un zoom déformant, toutes les difficultés d'En Marche pour ces élections municipales, pour le fonctionnement du parti et pour son implantation locale. À Paris, c'est l'élection catastrophe. Même dans des scénarios de série, les rebondissements ne sont pas aussi nombreux.
Après un processus de fausse primaire, il y a eu l'éclatement de La République En Marche avec la dissidence Villani, puis le "zizigate" de Benjamin Griveaux, comme certains qualifient cet épisode dans la majorité. Et puis arrive Agnès Buzyn. Là, c'est l'histoire d'une candidature hasardeuse puis scandaleuse.
Hasardeuse parce que certes Agnès Buzyn en avait envie, c'est sincère. Mais sa candidature était hasardeuse parce qu'elle a quitté pour ça, le ministère de la Santé en plein début d'épidémie de la Covid. Sa candidature est devenue scandaleuse quand elle a craqué, au lendemain du premier tour.
Agnès Buzyn a parlé de mascarade à propos de l'élection et elle a expliqué, comme pour se prémunir des procès à venir, qu'elle avait prévenu très tôt Emmanuel Macron et Édouard Philippe sur la catastrophe qui s'annonçait. Aujourd'hui encore, personne n'a digéré ces confidences particulièrement malvenues et ravageuses pour le pouvoir. Un ministre nous a confié : "Ce qu'elle a dit est inqualifiable, absurde. Elle aurait du abandonner". Malgré tout, Agnès Buzyn est encore candidate et maintenant, c'est l'opération "limiter la casse" qui a commencé ce mardi.
Dans certaines projections, La République En Marche risque de finir avec à peine un élu sur dix au conseil de Paris, un petit groupe d'opposition en somme. Alors, le travail des alliances a commencé, dans plusieurs arrondissements, En Marche pourrait fusionner avec les Républicains de Rachida Dati. De nouveaux contacts sont repris avec les équipes de Cédric Villani. Pas de quoi renverser Anne Hidalgo, à priori mais de quoi provoquer encore quelques remous dans une équipe de campagne déjà bien éprouvée.
Ses proches l'assurent, Agnès Buzyn est "motivée. Continuer est une preuve de son courage". Des colistiers sont un peu moins convaincus, l'un d'eux nous a confié: "Tout le monde pense qu'elle nous claquera dans les doigts quand quelques jours, disant qu'elle arrête parce qu'on ne l'a pas assez soutenue".
Les proches d’Anne Hidalgo ont du mal à cacher leur satisfaction, assez présomptueux comme ils peuvent l’être de temps en temps. Ils attendent même une part des électeurs d’En Marche au second tour. Ces mésaventures parisiennes sont un peu à l'image de ces municipales pour En Marche, parce que "le parti est faible". Ce n'est pas moi qui le dit, mais un influent responsable de la majorité. Normalement, Agnès Buzyn aurait dû être remplacée après ses confidences désastreuses, mais le patron du parti, Stanislas Guérini ne voulait pas y aller.
La stratégie d'En Marche aux municipales n'a pas fonctionné... Les terribles résultats du premier tour sont passés inaperçus, c'est normal, c'était la veille du confinement général. Mais dans un mois pour le second tour, ils ne s'annoncent guère plus brillants. Quelque soit l'échelle que l'on choisit, les métropoles, les grandes villes, les plus petites villes : le parti présidentiel ne brille pas.
Certes, En Marche partait presque de zéro, c'est vrai, mais il risque de ne pas faire beaucoup plus que zéro. À Paris, comme ailleurs, c'est En Marche vers la déroute.