ÉDITO - "Emmanuel Macron parle beaucoup mais un peu dans le vide", estime Étienne Gernelle

On a un peu l'impression qu'on a un Premier ministre qui fait des phrases, souvent très longues, et un président qui prêche dans le vide en ce moment. On peut se demander s'il y a encore quelqu'un à la barre. On entend aussi beaucoup de commentaires sarcastiques à propos de l'audience plutôt faible, un peu plus d'un million et demi de téléspectateurs, réalisé par l'émission autour d'Emmanuel Macron et des océans sur France 2. 

Alors bien sûr, il y a ce sentiment d'un président qui parle beaucoup. Il avait déjà fait, vous vous souvenez, une émission fleuve, en mai 2025, sur TF1, qui parle beaucoup, mais qui parle un peu dans le vide, non sans connaissance des dossiers d'ailleurs. Il n'était pas mauvais du tout sur les océans, mais dans une relative indifférence, il fait un peu penser à un chef Yanomami.

Pourquoi Emmanuel Macron fait penser à un chef Yanomami ?

Je vais sans doute vous surprendre, mais l'un des livres les plus intéressants et éclairants sur la politique actuelle est peut-être La Société contre l'État, un essai publié en 1974 par l'anthropologue célèbre Pierre Clastres, qui avait étudié des tribus isolées d'Amazonie, comme les Yanomami. Il avait d'ailleurs découvert le rite des chefs qui parlent dans le vide.

"Presque toujours, le leader s'adresse au groupe quotidiennement, à l'aube ou au crépuscule. Allongé dans son hamac ou assis près de son feu, il prononce d'une voix forte le discours attendu. Nul recueillement lorsque parle le chef, pas de silence, chacun tranquillement continue, comme si de rien n'était, à vaquer à ses occupations. La parole du chef n'est pas dite pour être écoutée", c'est formidable. On l'a compris, évidemment, la Yanomamisation d'Emmanuel Macron date de 2024, avec cette dissolution qui a dissous une bonne partie de ses pouvoirs.

Qu'en est-il de François Bayrou ?

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11/07/2025 à 02:06 - 24m50s

François Bayrou, lui, il éponge les conséquences de la dissolution. Le Premier ministre fait ce qu'il peut dans une situation impossible, sans majorité, avec des adversaires qui n'attendent qu'une occasion au plus tard à l'automne avec le budget, mais peut-être même avant, pour essayer de le faire tomber. Alors oui, il fait des phrases longues, mais c'est son style, assez bon d'ailleurs. Il s'exprime dans un français très soigné, c'est appréciable. D'ailleurs oui, parfois, il gagne du temps. Le conclave des retraites, par exemple, est une machine à gagner du temps. Mais il y a une raison quand même.

Quand il a été nommé, il n'était pas évident qu'il tienne plus de quelques semaines, et en particulier sur la question des retraites. En résumé, si le président parle parfois dans le vide, le problème du Premier ministre, lui, ce serait plutôt un trop-plein d'adversaires qui l'écoutent attentivement et qui l'attendent au tournant.

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