Kalachnikov : l'arme "à la mode" pour les narco trafiquants

La kalachnikov ne cesse de faire des ravages, près de 80 ans après sa création. À côté du city stade rebaptisé "Luigi Stadium" se dresse la tour numéro 7 de la cité Joliot-Curie de Saint-Denis (Île-de-France). Au 5e étage, Albertina Oliveira est accoudée à la table du salon, avec derrière elle sur l'étagère, le portrait de son fils Luigi. La photo d'un collégien souriant, les yeux rieurs derrière de grandes lunettes noires. 

"Ils ont enlevé mon fils, ils ont enlevé la moitié de moi aussi", chuchote la mère de famille. Albertina raconte ce 17 septembre 2018 : Luigi suit un groupe de jeunes de son quartier parti en découdre avec une bande rivale. 

Des coups de feu retentissent. L'adolescent de 16 ans meurt, touché par une rafale de Kalachnikov. "Des amis de ma fille ont frappé à la porte pour nous dire que Luigi avait été touché. Prendre une arme de guerre et tirer sur un enfant, ce n'est pas possible, ce n'est pas normal. Ces gens-là n'ont pas de pitié", souffle Albertina, qui réclame aujourd'hui que justice soit faite. Les assaillants visaient-ils Luigi ou était-ce une balle perdue ? L'enquête est toujours en cours. Quatre hommes sont mis en examen.

Une arme "à la mode"

Le fusil mitrailleur soviétique est "très simple d'utilisation", explique l'adjudant-chef Antoine Museau, du département balistique de l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale. "Il y a un fonctionnement semi-automatique, automatique ou rafale. Ça peut perforer beaucoup de choses, ça perfore les voitures, les vitres, les volets. Ce sont des choses qui ne peuvent pas, ou très difficilement, être maîtrisées", poursuit-il.

Pour attaquer un point de deal concurrent ou régler un compte par le sang, la kalachnikov est de plus en plus utilisée. Les vidéos d'hommes cagoulés descendant de voiture pour tirer en rafale dans une cité comme ici à Nîmes, se multiplient. Il concerne 15% à 20% des homicides ou tentatives d'homicides commis entre trafiquants de drogue, selon la police judiciaire. 

L'arme est prisée "parce qu'elle a un chargeur d'une capacité de 30 munitions, qu'elle s'enraye très rarement" en sus de "l'aspect film, gangster, qui va faire que la Kalachnikov est à la mode", détaille Antoine Museau. Par ailleurs, "les règlements de comptes ont deux intérêts : soit de tuer, soit d'impressionner. Et, dans les deux cas, la Kalachnikov est plus efficace qu'un revolver", soutient le gendarme. 

Livraison garantie

La plupart des narco-trafiquants se procurent ces armes via des intermédiaires.  "On est sur un faible nombre d'unités qui voyage par train, bus, véhicules", selon Arnaud Seguin, capitaine du service central de renseignement criminel de la gendarmerie nationale. "Les pays de l'Est sont une source. La filière des Balkans donnerait à se tarir. On peut également se questionner sur la corne de l'Afrique ou le Sahel", poursuit-il. 

Certains narco-tranfiquants se fournissent directement sur le dark web, sorte d'internet clandestin, accessible via des logiciels spécifiques. La rédaction numérique de RTL a pu accéder à ces sites illégaux pendant plusieurs heures. "Là, on est sur une page qui ressemble à un site de e-commerce où l'on peut acheter une Kalachnikov AK47, vendue 1300 dollars. On voit une photo qui prouve son authenticité. On peut l'ajouter au panier en cliquant sur un bouton, comme un t-shirt sur un site de vente classique. On trouve aussi des avis clients", décrit Benjamin Hue, journaliste de la rédaction de RTL. La livraison, assurée par un intermédiaire, est proposée partout dans le monde et le paiement s'effectue avec une monnaie virtuelle, intraçable. 

Pour rappel, la détention d'une Kalachnikov est punie de 5 ans de prison et 75.000 euros d'amende. 

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