Affaire Nadège Desnoix : le meurtrier de cette lycéenne a-t-il fait d'autres victimes ?

Mercredi 25 mai 1994, un promeneur découvre le corps de Nadège Desnoix, 17 ans, dans un sentier de Château-Thierry, dans l'Aisne. Autour d'elle sont retrouvés son cartable en cuir noir, sa ceinture, sa montre, une cordelette en nylon, ainsi qu'une rose fraichement cueillie. L'adolescente porte de nombreuses blessures par arme blanche. Si le légiste ne descelle pas de trace de viol, la scène ressemble grandement à une attaque à caractère sexuel.

Les enquêteurs s'intéressent alors à Michel Fourniret. Dans l'une de ses dépositions, l'homme fait allusion à un déplacement où il a garé sa camionnette près d'un rosier, sa fleur préférée. Le tueur en série et son épouse Monique Olivier sont entendus, mais au moment du meurtre de Nadège Desnoix, ils se trouvaient à Namur, en Belgique. L'ADN du couple ne correspond pas non plus aux traces retrouvées sur les affaires de la victime : huit au total, sept empreintes masculines et une féminine. 

Il faut attendre 2021, soit plus de plus de vingt-cinq ans après la mort de Nadège Desnoix, pour que le juge d’instruction ordonne trois nouvelles comparaisons ADN. Une nouvelle trace génétique masculine vient en effet d’être extraite du chouchou que portait la lycéenne. Une correspondance est trouvée avec un certain Pascal Lafolie, bientôt 55 ans.

"Dès que les enquêteurs voit son nom, ça colle. Il a déjà été condamné à deux reprises. La première affaire remonte en 1996, il s'en prend à une adolescente de 14 ans qui marchait sur un chemin, raconte Sophie Neumayer, journaliste et cheffe adjointe au service police-justice de RTL. Quatre ans plus tard, il récidive avec le même mode opératoire, il a toujours un couteau et une cordelette, et il demande un acte sexuel contraint. Il est condamné pour viol en 2002 à une peine de 12 ans de réclusion. Et là, on se dit que ça aurait été pertinent que les enquêteurs prennent son ADN pour le mettre dans le logiciel, mais en 2002, c'est encore les balbutiements malheureusement."

Meurtrier ou témoin ?

Pascal Lafolie est placé en garde à vue. On l'informe que son ADN figure sur la scène de crime de la lycéenne Nadège Desnoix. L'homme reconnait aussitôt les faits. Il déclare d'emblée : "Je ne pensais pas que ça finirait en meurtre pour une fellation. J'ai des regrets. C'est un peu vague parce que ça fait des années et j'ai du mal à me rappeler", indique-t-il. Il est mis en examen pour meurtre.

"Cet homme à un couteau et une corde dans sa voiture, on pense qu'il part en chasse parce qu'il a envie de récupérer une jeune fille et d'avoir une relation sexuelle assez particulière : il ne s'agit que de fellation, explique Me Gérard Chemla, avocat des frères et sœurs de Nadège Desnoix. Le but étant de la forcer à cette fellation et c'est précisément ce qui se passe à chaque fois. Quand elle ne se laisse pas faire, et c'est manifestement le cas de Nadège Desnoix, ça se termine mal."

Un an plus tard, Pascal Lafolie revient sur ses déclarations. Il ne se reconnait plus dans le rôle du meurtrier de Nadège Desnoix, même s'il ne peut toujours pas expliquer la présence de son ADN sur le chouchou de la victime. Il raconte que quand la lycéenne a été tuée, il était accompagné de son frère Franck. C'est lui qui a agressé sexuellement la jeune fille. Malheureusement, l'homme ne peut plus témoigner, il est décédé il y a quelques mois. "Franck a pris la fille par le bras gauche et a sorti un couteau. Je me suis interposé pour la défendre, mais mon frère m'a donné un coup de tête. Je me suis évanoui. Après, je me souviens de rien", dit-il.

Mardi 21 mai 2024, le corps de Franck Lafolie est exhumé. Sa trace ADN ne correspond pas à celles retrouvées sur la scène de crime de Nadège Desnoix. L'un des avocats de la partie civile, Me Arnaud Miel, dénonce un homme qui a fait déterrer son frère pour essayer de semer le doute. Le 26 novembre 2024, le juge d'instruction d'Amiens ordonne finalement le renvoi de Pascal Lafolie devant la cour d'assises de l'Aisne. Depuis janvier 2023, le parcours criminel de Pascal Lafolie est disséqué au pôle judiciaire des cold cases à Nanterre pour savoir s'il ne serait pas impliqué dans d'autres crimes non résolus.

L'invité de "L'Heure du crime"

- Me Gérard Chemla, avocat au barreau de Reims et avocat des frères et sœurs de Nadège Desnoix. 
- Me Justine Devred, avocate au barreau de Senlis, avocate de Pascal Lafolie et ancienne bâtonnière du barreau de Senlis.
- Sophie Neumayer, journaliste et cheffe adjointe au service police justice de RTL.

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