Affaire Khashoggi : un meurtre "sauvagement planifié" selon Ankara

Le président turc Recep Tayyip Erdogan doit donner mardi 23 octobre une conférence de presse, dans laquelle il a promis de révéler "toute la vérité" sur la mort du journaliste saoudien.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan, le 16 octobre 2018

Crédit : ADEM ALTAN / AFP

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Ankara hausse le ton. La Turquie a affirmé lundi 22 octobre que le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi avait été "sauvagement planifié" et promis que "rien ne resterait secret" dans cette affaire. Ces déclarations interviennent à la veille de révélations promises par le président Recep Tayyip Erdogan.

"Nous sommes face à une situation qui a été sauvagement planifiée et des efforts conséquents ont été déployés pour dissimuler" ce meurtre, a déclaré Omer Celik, porte-parole du parti au pouvoir en Turquie (AKP). Quelques heures plus tard, le porte-parole du président turc, Ibrahim Kalin, a accentué la pression en affirmant que "rien ne resterait secret" et que les enquêteurs iraient "au fond de cette affaire".

Après avoir soutenu que Jamal Khashoggi était ressorti vivant du consulat, les autorités saoudiennes ont finalement admis samedi qu'il y avait été tué, mais ont nié toute préméditation. Le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir a indiqué dimanche que Jamal Khashoggi avait été victime d'un "meurtre", évoquant une "opération non autorisée" par le pouvoir, dont Mohammed ben Salmane n'était "pas informé".

Le prince héritier dans la tourmente

Des explications qui n'ont "pas satisfait" Donald Trump. "Nous en saurons très bientôt davantage", a dit à la presse le président américain, qui avait déjà évoqué la veille les "mensonges" de Riyad. Son gendre et conseiller Jared Kushner a de son côté conseillé à MBS "d'être transparent". Dans la soirée, l'agence d'État saoudienne SPA annonçait que "MBS" avait reçu le secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin.

La presse proche du pouvoir turc s'est efforcée lundi de démonter la version saoudienne. Selon le quotidien Yeni Safak, le chef d'un commando saoudien de 15 agents dépêchés à Istanbul pour tuer le journaliste a été directement en contact avec le bureau du prince héritier. Présenté comme un membre de la garde rapproché de "MBS", Maher Abdulaziz Mutreb a appelé "à quatre reprises le directeur du bureau du prince héritier, "dont au moins un "depuis le bureau du consul général".

Dans le quotidien Hurriyet, un éditorialiste proche du pouvoir turc affirme que Khashoggi a été immédiatement conduit vers le bureau du consul où il a été "étranglé" par les agents saoudiens. "Cela a duré entre 7 et 8 minutes". Le corps a ensuite été "coupé en 15 morceaux" par un médecin légiste faisant partie du commando saoudien, a ajouté l'éditorialiste. Selon lui, le corps démembré a été sorti du consulat, mais se trouverait toujours dans un endroit inconnu à Istanbul.

Une crise de crédibilité

Selon le médias turcs, la police a retrouvé un véhicule du consulat saoudien, équipé d'une plaque d'immatriculation diplomatique, "abandonné" dans un parking souterrain d'Istanbul. La chaîne américaine CNN a pour sa part diffusé des images de vidéosurveillance montrant un des agents saoudiens quittant le consulat par une porte arrière portant les vêtements dont était vêtu Jamal Khashoggi à son arrivée, ainsi qu'une barbe factice.

Ces révélations surviennent à la veille d'une intervention très attendue de Recep Tayyip Erdogan au cours de laquelle il a promis de révéler "toute la vérité" sur la mort du journaliste. Signe toutefois du caractère sensible de cette affaire sur le plan diplomatique, le porte-parole du président a déclaré qu'Ankara "ne voudrait pas" que ses relations avec l'Arabie saoudite, un "pays frère et ami", en "pâtissent".

Outre une crise de crédibilité, ce scandale international a poussé au boycott, par des responsables occidentaux et des dirigeants de firmes internationales, d'une grande conférence économique, chère au prince héritier, prévue à Riyad à partir de mardi. Le site de ce forum a été mis hors ligne lundi, victime selon les médias saoudiens d'une "attaque électronique".

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