Le jus d’orange sous pression. Vous l’avez peut-être déjà remarqué : le jus d’orange concentré commence à manquer dans nos rayons. Selon l'Unijus, le syndicat des producteurs de jus de fruits, la production mondiale de concentrés de jus d'orange a chuté dans le monde.
Il existe plusieurs types de jus d’orange : le nectar, le pur jus, et le concentré. Tout se joue dans la fabrication. Pour le concentré, on presse le jus, mais ensuite l’eau est retirée par évaporation. Cela permet de garder une pâte qui est congelée, puis expédiée. Une fois arrivée à bon port, on rajoute de l’eau à cette matière première pour faire un jus d’orange qui est conditionné en bouteille.
Si tout ce processus est mis en place, c’est parce que le transport est plus simple et moins coûteux que le pur jus par exemple. En France, le jus d’orange concentré représente 30% des ventes. Or, il commence à en manquer dans les rayons.
Si à la maison tout le monde en boit au petit-déjeuner le matin, vous avez peut-être du mal à trouver des bouteilles de 2 litres de jus d’orange concentré. Car il en manque déjà dans certaines grandes surfaces. C’est ce qu’explique Emmanuel Vasseneix, président de l’Unijus : "Nous manquons de concentré d’orange […] on a la moitié de nos besoins pour alimenter nos clients", explique ce dernier.
Le président du syndicat explique donc avoir trouvé une solution temporaire : "On a décidé d’arrêter toute opération promotionnelle sur le jus d’orange. On a fait le choix de mettre des briques d’un litre par rapport aux briques de 2 litres et 2,5 litres pour avoir toujours un approvisionnement en quantité qui soit régulier", révèle-t-il.
Plusieurs raisons expliquent cette pénurie. Tout d'abord, parce qu'on trouve simplement moins d’oranges. Les aléas climatiques en sont une des raisons principales et touchent les premiers producteurs du monde : le Brésil, les États-Unis… En Floride, par exemple, l’ouragan Ian en septembre 2022 a dévasté les cultures. Résultat, cette année, 650.000 tonnes de ce précieux fruit ont été ramassées, tandis qu'on en récoltait 2 millions l’année dernière.
En Espagne et au Mexique, c’est la sécheresse qui fait chuter la production, notamment de 30% au Mexique. Mais ce n’est pas le seul problème. Les producteurs se battent aussi contre un insecte qui ravage les orangers.
Depuis 2004-2005 on est à la merci de cette bactérie.
Éric Imbert, chercheur à l'INRA
Depuis de nombreuses années, les producteurs combattent la maladie du dragon : des insectes injectent une bactérie qui tue le fruit. Aucun remède n’a été trouvé, et cela représente un vrai danger pour le fruit selon Éric Imbert, chercheur au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD). "Depuis 2004-2005 on est à la merci de cette bactérie, la seule chose qu’on sait faire c’est essayer de renforcer les arbres avec des traitements sanitaires et lutter contre le vecteur de propagation de cette maladie", explique-t-il.
Le Brésil, qui est de loin le premier producteur mondial de jus d’orange avec 13 millions de tonnes représente à lui 50% de la production. Ses stocks sont à présent les plus bas enregistrés sur ces 5 dernières années. Faute de disposer de leurs propres stocks, les industriels américains se tournent donc désormais vers le pays pour s'approvisionner. Sa production, qui abreuvait l’Europe se déporte vers les États-Unis : ce qui provoque une tension sur les prix.
Et comme beaucoup d’autres produits alimentaires, il n’a pas échappé à l’inflation. Vous l’avez sûrement remarqué quand vous faîtes vos courses. Pour vous donner un ordre d’idée, la tonne de concentré d’oranges coûte 3.400 euros aujourd’hui, contre 2.600 euros au mois de février.
Mécaniquement, cette hausse de prix se répercute directement sur le portefeuille du consommateur. Les spécialistes tablent sur une augmentation de 15 à 25 % sur le litre de jus d’orange concentré.
L’arrivée de la nouvelle récolte pourrait bien inverser la vapeur, mais ce n’est pas pour tout de suite. "Au Brésil, à partir du mois de juin jusqu’au mois d’octobre-novembre", indique encore Emmanuel Vasseneix. Et d'ajouter : "Dès l’instant où ces nouvelles récoltes vont arriver, on va être approvisionné. Mais pour les temps de fabrication et de transports par bateaux, on va avoir deux à trois mois". Un retour à la normale n’est donc pas prévu avant le mois de septembre.