163 salariés du sous-traitant aéronautique Derichebourg vont être licenciés. Le motif : ils refusent de baisser leur salaire. Cette baisse a pourtant été actée dans le cadre d’un accord de performance collective. À première vue ça paraît fou, mais pour bien comprendre de quoi on parle, c’est en réalité légal. Les accords de performance collective existent depuis 2017.
Ils ont toutefois été très peu utilisés jusqu’à présent. 371 accords ont été signés en trois ans, surtout dans des PME. Mais quand un accord est signé, validé, par la majorité des représentants du personnel, ceux qui ne sont pas contents prennent la porte. Dans le cas de Derichebourg, ça concerne quand même 10% des salariés, c’est loin d’être négligeable.
Mais alors comment des représentants peuvent accepter de tels accords ? C'est en réalité parce que l’entreprise est en crise, et souvent que le patron est lui-même est aussi au pied du mur. Quand le risque c’est la fermeture ou des licenciements en masse, le choix des salariés penchera souvent pour ce qui ressemble à la moins pire des solutions, garder son travail, même dans des conditions dégradées.
Dans le cas précis de Derichebourg, l’accord porte sur les rémunérations. Mais dans plus d’un accord de performance collective sur deux, l’effort concerne en fait le temps de travail : les entreprises demandent aux salariés de travailler plus. Ils doivent donc augmenter la cadence pour le même salaire.
Travailler plus, c’est un débat qui est revenu plusieurs fois ces derniers mois. Est-ce que pour sortir de la crise, il va falloir se préparer à travailler plus ? En réalité oui et non : il va falloir à la fois s’habituer à travailler plus et à travailler moins.
Pour les deux ans qui viennent, il y aura des secteurs où les chefs d’entreprises demanderont plus de productivité, avec donc cet outil qu'est l’accord de performance collective. En même temps, d’autres entreprises vont devoir ralentir la cadence et faire chuter l’activité en utilisant le chômage partiel. Ce sera le rôle d’un deuxième outil, l’activité partielle de longue durée.
L’entreprise Safran vient de signer un accord APLD à l’unanimité des syndicats. Mais dans cette histoire, on dirait que le salarié est toujours la variable d’ajustement. Il va l’être d’autant plus dans les prochains mois, d’où l’importance vitale d’une justice sociale afin d’éviter les abus. Il faut avoir un vrai dialogue entre chefs d’entreprises et salariés. La question des contreparties sera également primordiale.
Le gouvernement en est conscient : l’effort fait par les salariés devra être rendu. En conservant les emplois certes, en limitant les dividendes des actionnaires, mais aussi en redistribuant une partie des richesses produites. C’est pour cela que le développement de l’intéressement et de la participation fera partie du plan de relance.
Mais au-delà de la relance, au-delà de l’urgence de la crise, sur le long terme, le fait de travailler plus longtemps va bien faire partie des débats à venir. Le gouvernement a prévu d’en reparler à l’automne. Tout simplement parce qu’un salarié qui travaille cotise et c’est de l’argent dans les caisses de l’État. De l’argent nécessaire, soit pour boucher les trous du déficit, je pense notamment au déficit du système des retraites, soit pour financer des acquis sociaux, comme la loi autonomie pour le grand âge notamment.
Et pour être sûr qu’on n’oublie pas cette petite musique du temps de travail, la ministre du Travail s’est chargée d’en reparler dans les Échos, juste avant de partir en vacances. Elibabeth Borne a dit que "la durée de travail sur une année, comme sur l’ensemble d’une carrière est plus faible en France que dans d’autres pays européens".
Alors faudra-t-il cotiser davantage avant sa retraite ? Aura-t-on un peu moins de congés ? Est-ce que l’année de travail classique, 1.607 heures par an, pourrait être augmentée ? Tous ces efforts, cette flexibilité, certains diront que ce sont du sang et des larmes. C'est ce qui attend très certainement les salariés. Encore faut-il que le gouvernement trouve le ton juste pour expliquer, pour justifier ces efforts. La conséquence sinon, ce n’est pas 10% de licenciements comme chez Derichebourg, c’est un mécontentement qui s’exprimera soit dans la rue, soit en pourcentage, mais dans les urnes.
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