"Ils n'admettent pas la chance qu'ils ont eue" : le malaise de certains trentenaires face aux retraités

C'est à partir de ce mardi 4 novembre que les députés examinent le budget de la Sécurité sociale (PLFSS) à l'Assemblée nationale, avec au programme la question de la suspension de la réforme des retraites.

Un événement important, alors que 67% des Français de moins de 35 ans ont le sentiment de vivre moins bien que leurs parents selon une note du Haut-commissariat au plan. 

Que ce soit en termes de patrimoine, de diplôme ou de logement, le malaise de ces jeunes actifs est très concret, comme le raconte Katy. "Je vois des 3 pièces de 80 m² avec 2 chambres, pour 499.000 euros. Bon, là, je ne pourrais pas l'acheter", regrette cette jeune de 29 ans, debout face à la vitrine d'une agence immobilière à Versailles, où les prix sont affichés en rouge.

Aujourd'hui, Katy habite dans un T3 avec une seule chambre pour elle, son fiancé et son fils d'un an. C'est un appartement qu'elle aurait aimé pouvoir acheter, sachant qu'elle paye actuellement un loyer de 1.400 euros par mois. "Il était à vendre 400.000 euros et ça faisait un emprunt à rembourser de près de 2.000 euros... C'était beaucoup trop cher. Peut-être que dans cinq ou dix ans, on peut se dire qu'on pourra éventuellement acheter", espère-t-elle.

Depuis cinquante ans, la difficulté d'accéder à la propriété pour les jeunes s'est corsée. Si on prend la même surface, le même apport et le même taux, il fallait dix ans pour rembourser son emprunt en 1975, contre 23 ans aujourd'hui.

Un septuagénaire est en moyenne quatre fois plus riche qu'un trentenaire aujourd'hui

Et pourtant, Katy est ingénieure en recherche et développement et possède un doctorat à bac +8. "Je touche uniquement en net 2.300 euros après impôts. Je fais le boulot qui correspond à mon niveau d'études. Mais on est moins bien payés aujourd'hui que des gens avec un même niveau d'études il y a 40 ans", déplore la jeune femme.

En un demi-siècle, le patrimoine - c'est-à-dire l'épargne et l'immobilier - s'est largement concentré dans les mains des plus âgés. Aujourd'hui, une personne de plus de 70 ans est quatre fois plus riche qu'un trentenaire en moyenne, alors que c'était à peu près égal il y a encore 40 ans. De quoi faire naître un certain malaise chez les nouvelles générations.

"Les retraités aujourd'hui n'admettent pas la chance qu'ils ont eue. Ils avaient des augmentations de salaire de 7% par an. Le coût des biens était dix fois inférieur. Ça n'avait rien à voir", juge Katy, qui estime cotiser entre 450 et 500 euros par mois pour "financer la retraite de personnes qui touchent autant que les actifs".

"Des éléments objectifs de déclassement", mais pas que...

"Quand j'avais 30 ans, je pense que c'était difficile aussi, rétorque Nadine, du haut de ses 71 ans. Je touche 1.600 euros par mois et je ne pense pas que les retraités touchent trop".

Pour Katy, il y a tout de même un décalage car ces retraités "n'ont théoriquement plus grand-chose à acheter". "Il faut prendre en compte qu'aujourd'hui, la classe des retraités correspond à celle qui épargnent le plus", assure-t-elle.

Autrement dit, la perception n'est pas la même selon les générations. Mais il ne faut pas non plus tomber dans la caricature : en 50 ans, les jeunes ont en moyenne glané un salaire 12% plus élevé. Ils ont désormais plus de temps libre et il y a plus d'égalité entre les hommes et les femmes.

"Je ne crois que ce n'était pas mieux avant. Il y a des éléments objectifs de déclassement. Il y a aussi des éléments qui montrent que ça va mieux. Donc, c'est aussi une incitation à agir pour la jeunesse qui est peut-être un peu moins qu'il y a 30 ou 40 ans au centre des questions de la société", estime ainsi Clément Beaune, haut-commissaire au plan, qui a diligenté cette note. Ces chiffres pourraient donner des indications à l'Assemblée pour voter le budget.

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