La loi Blanquer définitivement entérinée par le Sénat. Après l'adoption mardi 2 juillet du projet de loi contesté "pour une école de la confiance" par l'Assemblée nationale, la Chambre haute a voté le texte ce jeudi 4 avril.
La majorité sénatoriale de droite s'est félicitée que les deux chambres aient pu parvenir à un "bon accord", la gauche votant contre un texte "qui ne répond pas aux enjeux", selon elle, de l'Éducation nationale. Une simple formalité, car députés et sénateurs s'étaient mis d'accord le 13 juin dernier sur une version commune, remaniée par rapport au projet de loi initial.
Objectif : permettre une adoption définitive rapide et une application dès la rentrée prochaine. Alors quels sont les points qui auront survécu à la commission mixte paritaire ? Que reste-t-il en somme du projet de loi Blanquer ?
L'âge de l'instruction obligatoire sera abaissé à 3 ans, contre 6 aujourd'hui. Cette obligation, traduction d'un engagement pris par Emmanuel Macron en mars 2018, doit entrer en vigueur dès la rentrée prochaine. Elle ne concernera que 26.000 enfants qui ne fréquentent pas l'école actuellement.
L'abaissement d'âge, inédit depuis 1882, ne remettra pas en cause le droit de dispenser un enseignement par la famille mais son contrôle sera renforcé. Par ailleurs, la mesure génèrera des dépenses supplémentaires pour les communes qui devront financer les maternelles privées sous contrat. L'État remboursera ces collectivités via une compensation mais pas celles aidant déjà ces écoles.
Des aménagements du Sénat été conservés : assouplissement de l'obligation d'assiduité en petite section, prolongation de la dérogation pour les enfants de 3 à 6 ans fréquentant des jardins d'enfants.
Actée également, l'obligation de formation pour tous les jeunes âgés de 16 à 18 ans. Par cette mesure prévue dans le plan pauvreté, les jeunes "décrocheurs", évalués à 20.000 par an par le gouvernement, se verront systématiquement proposer, à partir de 2020, une formation ou un apprentissage.
Le texte impose l'affichage, dans les salles de classe des écoles, collèges et lycées, des drapeaux français et européen, de la devise "Liberté, Egalité, Fraternité" et des paroles de l'hymne national. Jusqu'ici, la présence obligatoire des drapeaux - agrémentés de la devise républicaine - était limitée au fronton des écoles.
En outre, lorsqu'une carte de France est présente dans les classes, celle-ci doit représenter les territoires d'outre-mer en plus de la métropole.
Chaque formulaire administratif destiné aux parents d'élèves donnera la possibilité de choisir entre les mentions "père" et "mère", finalement conservées, et "autre représentant légal". Cette dernière mention a été ajoutée pour tenir compte de "la diversité des situations familiales" et ainsi reconnaître l'homoparentalité.
L'Assemblée avait initialement voté pour remplacer les mentions "père" et "mère" par "parent 1" et parent 2" mais la mesure, qui avait suscité la polémique, a été réécrite.
Les "pions" pourront remplir des fonctions d'enseignement à condition de préparer les concours de recrutement, et seront rémunérés pour cela dès leur deuxième année de licence. Ce pré-recrutement vise à accroître l'attractivité du métier.
Les écoles supérieures du professorat et de l'éducation (Espé) vont devenir des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (Inspé). Le contenu des formations - volume horaire des disciplines, équilibre théorie/stages et place du concours - sera précisé ultérieurement par le ministère.
Le Conseil d'évaluation de l'école (CEE) remplacera le Cnesco (Conseil d'évaluation du système scolaire). Il aura entre autres la charge de coordonner les évaluations conduites par le ministère.
Sur le modèle de l'École européenne de Strasbourg, les établissements publics locaux d'enseignement international (EPLEI) accueilleront des élèves de la maternelle à la terminale, pour les préparer au baccalauréat européen ou à l'option internationale du diplôme national du brevet et du bac.
Les AESH (accompagnants des élèves en situation de handicap) se verront proposer désormais des CDD de trois ans, renouvelables une fois, avec un CDI à la clé au bout de six ans. Jusqu'à présent, les CDD étaient d'un an, renouvelables six fois avant l'obtention d'un CDI. C'est "insuffisant" pour les syndicats, qui réclament un "vrai statut de fonctionnaire", de manière à "répondre à un besoin permanent".
Le droit à une scolarité sans harcèlement a été inscrit. Le projet de loi rappelle le devoir d'"exemplarité" des personnels et en retour le nécessaire "respect" des élèves et de leur famille vis-à-vis d'eux et de l'institution scolaire.
Les écoles publiques et privées pourront déroger à la loi en vue d'"expérimentations pédagogiques", limitées dans le temps. La création d'un rectorat de plein exercice devrait aussi voir le jour à Mayotte.
Au registre des mesures sacrifiées : le possible regroupement des classes d'un collège et d'une ou plusieurs écoles au sein d'un nouveau type d'établissement "des savoirs fondamentaux". Les enseignants s'étaient montrés farouchement contre.
Le Sénat a également renoncé à la possibilité d'une retenue sur les allocations familiales pour lutter contre l'absentéisme, et à l'interdiction de signes religieux ostentatoires pour les parents accompagnateurs lors des sorties scolaires.