Gérald Darmanin a donné le 22 avril une estimation du déficit de la sécurité sociale. Ce n'est plus un trou, c'est un cratère : 41 milliards d'euros de déficit en 2020.
Un chiffre qui enfonce le précédent record, en 2010, où l'on était à - 28 milliards, à cause des effets persistants de la crise économique et financière de 2009. Cette fois-ci, le déséquilibre se creuse à cause d'un effet de ciseau. D'un côté, les ressources de la sécu s'amenuisent, parce que l'emploi diminue, et avec lui les cotisations sociales, qui financent l'assurance-maladie. Et de l'autre les dépenses de santé augmentent, à cause de l'épidémie. Moins de recettes, plus de dépenses, ça fait plus de déficit, par rapport à une année 2019 où les comptes étaient à l'équilibre.
Les chiffres budgétaires donnés ne cessent de se dégrader, mais est-ce pour autant que l'on a touché le fond ?
Cette estimation fait l'hypothèse que les entreprises paieront finalement les charges qui ont été reportées, c'est très peu probable. Ensuite, tout dépendra de la reprise, de son intensité et de son calendrier, imprévisible aujourd'hui. À cela s'ajoute le déficit de l'État, énorme, celui de l'assurance-chômage, qui sera sans précédent lui aussi, peut-être celui des collectivités locales. Au total, le déficit public français sera de plusieurs centaines de milliards d'euros. En points de PIB, on sera certainement au-dessus de 10%. Pour rappel d'une époque qui semble une autre époque, et qui pourtant n'est pas si lointaine, la limite de Maastricht pour les déficits, c'était 3% du PIB.
Oui, à deux réserves près, importantes. La dette accumulée cette année grèvera les comptes des années futures. Normalement, la CRDS (Contribution pour le remboursement de la dette sociale), c'est un prélèvement fait à peu près sur l'assiette de la CSG (Contribution sociale généralisée), qui frappe nos salaires pour rembourser la dette de la sécu, devait s'arrêter en 2024.
On peut déjà prévoir que ça ne sera pas le cas. Et par ailleurs, il va falloir financer une augmentation structurelle des dépenses de santé : l'entretien de milliers de lits de réanimation surnuméraires, tant qu'il n'y a pas de traitement pour le virus, le coût de stocks de centaines de milliers de masques, l'organisation de filière française de production de médicaments sur lesquels nous sommes en risque de pénurie, le fameux curare par exemple, qui sert pour l'anesthésie. Et bien sûr, les salaires des soignants, qui vont progresser durablement.
En Europe, une fois de plus c'est le Sud qui a été fortement frappés par l'épidémie, c'est-à-dire l'Italie, l'Espagne et la France. En Allemagne, aux Pays-Bas, et grossièrement en Europe du Nord, l'épidémie est moins mortelle, les dépenses de crise devraient être moins fortes que chez nous. Et la situation budgétaire de départ était bien meilleure que la nôtre. Le tableau n'est donc pas le même ce qui est un souci de plus pour demain. Le virus va élargir le fossé économique et budgétaire entre les deux moitiés de l'Europe.
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