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Vin : "magnum", "nabuchodonosor"... Quels sont les noms de nos bonnes bouteilles ?
Nos bouteilles de vin portent parfois de bien drôles de noms… le point viticole avec Muriel Gilbert.
Dans une grille de mots croisés, notre correctrice a déniché cette énigme : “Belles bouteilles de bordeaux.” Solution : "impériales". Face à cette réponse étonnante, rien dans le Larousse, rien dans le Robert.
C’est la limite des dictionnaires grand public, ils ne contiennent pas tous les mots de la langue française, évidemment… surtout en matière de vocabulaire professionnel.
Sur des sites spécialisés en œnologie, la réponse apparait : l’impériale, c’est un mathusalem de bordeaux. Rappelons au passage que le bordeaux, quand c’est du vin, ne prend pas de majuscule. Pas plus que le bourgogne ou le côtes-du-rhône.
Un mathusalem, c’est une grosse bouteille : 6 litres.
Pourquoi 0,75 litre pour une bouteille ?
La plus petite des contenances, c’est le piccolo (qui opportunément veut dire “petit” en italien). Le piccolo, c’est à peu près un verre et demi de vin, 20 cl ou un peu moins. C’est la bouteille qu’on vous sert en avion ou dans le train.
Puis vient la chopine, 25 cl, puis la fillette, qui équivaut à une demi-bouteille. On l’appelle aussi la demie et pourtant, elle ne contient pas 1/2 litre, ce serait trop simple : la demie contient 37,5 cl.
Cela s'explique car une bouteille de vin “normale” en France, le format standard depuis 1866 exactement, c’est non pas 1 litre mais 75 cl. Le format au-dessus, c’est le plus connu peut-être : le magnum – le magnum de champagne, une certaine image du luxe bling-bling. C’est un litre et demi.
Puis viennent les formats rares : le jéroboam, 3 litres, le réhoboam, 4 litres et demi, le mathusalem (ou impériale, donc), 6 litres (ça fait 48 verres quand même !), puis le salmanazar, 9 litres, le balthazar, 12 litres ; le nabuchodonosor, 15 litres ; le melchior (ou salomon), 18 litres ; puis viennent les géantissimes souverain, 26 litres ; primat, 27 litres ; melchisédech (ou midas), 30 litres. Tout cela avec modération, bien sûr !
Si la bouteille standard ne contient pas 1 litre, c'est que cette contenance est devenue le standard officiel à la fin du XIXe siècle, quand les Anglais étaient alors les principaux clients des viticulteurs français. Leur unité de mesure pour les liquides était non pas le litre mais le gallon impérial, qui équivalait à 4 litres et demi. La conversion était compliquée.
Or, les Anglais transportaient le vin en barriques de 50 gallons, soit 225 litres… On s’est aperçu que cela correspondait à 300 fois 75 cl. En décidant que la bouteille standard ferait 75 cl, on a simplifié le commerce transmanche !
Et c’est la même raison, d’ailleurs, qui explique que nos caisses de vin ne contiennent pas 5 ou 10 bouteilles mais toujours 6 : parce que 6 X 75 cl, cela faisait exactement 1 galon impérial. Messieurs les Anglais, buvez les premiers – avec modération !
