Catherine, de Vertou, en Loire-Atlantique, m’écrit : "J'ai appris à l'école primaire, il y a très longtemps, que lorsqu'on mettait 'sans' devant un mot, ce mot ne se mettait jamais au pluriel puisque 'sans' signifie 'rien'. Aujourd'hui, je constate souvent que le pluriel est utilisé. Pourquoi ? Je suis un peu perturbée par tous ces changements…".
La règle que l'institutrice de Catherine est toujours d’actualité. C’est sans doute ce qu’on enseigne encore à l’école primaire. Le fait est qu’on ne peut pas enseigner toutes les subtilités de l’orthographe du français à des enfants de 7 ou 8 ans… Or la règle qui s’applique à "sans" est un peu subtile, niveau lycée disons… ou au moins collège.
Mais d’abord, voyons d’où vient ce "sans". Il est issu du latin "sine", que l’on trouve encore aujourd’hui dans la locution latine "sine die", c’est-à-dire “"sans qu’une date soit fixée". Ça se dit essentiellement dans l’univers du droit et de la justice aujourd’hui, un monde qui adore les locutions latines. On parle par exemple d’audience renvoyée sine die, ou de débat reporté sine die, c’est-à-dire repoussé à une date qui reste à déterminer.
Le mot sans est repéré par mon cher Dictionnaire historique de la langue française dès le Xᵉ siècle, mais il s’écrit alors "SEN". Au XIᵉ, il se complique : il passe à "SENZ", puis "SEINZ", et ce n’est que vers l’an 1200 qu’on arrive à la graphie "SANS". Ouf !
Aujourd’hui, "sans", selon Larousse.fr, est une préposition qui "marque la privation, le manque, l'absence, l'exclusion", avec les exemples : "Une boisson sans alcool" ou "soyez sans crainte." Alors, pour ce qui est de la question du singulier ou du pluriel après "sans", qui préoccupe tant notre Catherine, dans les deux cas que je viens de citer, en effet, sans alcool, sans crainte, c’est au singulier. Donc, certes, "sans" veut dire "rien", comme l’a appris Catherine… mais pas seulement… ou, pas n’importe quel rien !
Si à l’entrée "sans", vous cliquez, dans Larousse.fr, sur cet onglet, en haut de la page, dont je vous parle si souvent parce que c’est une mine pour tous ceux qui se posent des questions métaphysiques sur l’orthographe, vous lirez la chose suivante : "Le nom qui suit la préposition sans se met au singulier ou au pluriel, selon le sens. Ainsi, on écrit ‘une jupe sans ceinture’ [sans S à ceinture] (car une jupe ne peut avoir qu'une seule ceinture) mais un manteau sans boutons [avec un S à boutons] (car un manteau possède habituellement plusieurs boutons).
On écrira de même : je viendrai sans faute [c’est-à-dire, je viendrai à coup sûr, et c’est sans S à faute parce que l’expression est figée ainsi] mais une dictée sans fautes” [parce que dans une dictée, eh oui, il est bien rare que l’on n’y fasse pas plusieurs fautes]. Autre exemple intéressant que donne notre dico en ligne : on écrira "c'est un homme sans parole" (sans S à parole, c’est quelqu’un qui ne respecte pas ses engagements, il n’a aucune parole) mais on écrira "c’est une histoire sans paroles" avec un S à paroles… parce qu’une histoire, normalement, est composée de plein de paroles.
Pour terminer, je donne souvent l’exemple : je suis sortie sans parapluie et sans bottes (sans S à parapluie parce que, en général, je n’en prends qu’un, mais avec un S à bottes, puisque par défaut j’en mets deux.) Je pourrais aussi dire que Catherine s’est offert un gilet sans coL et sans mancheS, sans S à col mais avec un S à manches, puisque normalement un gilet a un seul col mais deux manches. Et, hop, vous voilà rhabillée de neuf, Catherine !
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