Orthographe : faut-il écrire "prendre parti/e" ou "prendre à parti/e" ?

Amis des mots, nous allons parler de mots que l’on confond souvent, encore des mots qui se prononcent de la même façon qui s’écrivent différemment, ces pièges dont la langue française fourmille… et qui font le charme de nos dictées.

Et tenez, saisissez-vous donc d’une feuille de papier et d’un stylo, amis des mots, et commençons par une toute petite dictée : je sais que vous adorez ces mini-défis. Nous allons parler de parti et partie. Eh oui, naturellement, ça se prononce pareil. Allez, voici ma minidictée, je dicte.

"J’aimerais prendre parti/e pour le parti/e dont tu fais parti/e sans être vraiment parti/e prenante car je crains d’être prise à parti/e par des adversaires qui chercheraient à en tirer parti/e."

Il y a des dizaines d’expressions qui utilisent parti/e en français, et il est franchement fréquent qu’on se demande lequel on doit utiliser… ou qu’on ne se le demande pas, si j’en juge par le nombre d’erreurs que je vois circuler un peu partout.

"Le parti" et "la partie"

En fait, il y a le parti et la partie : le parti et la partie. Quand on a un article, féminin ou masculin, devant parti/e, c’est simple : un parti politique, une partie du corps pas de problème. Mais "j’aimerais prendre parti/e", est-ce un ou une partie ? "Il faut que tu tires parti/e de cet avantage" : parti ou partie ? C’est tout de suite un peu plus compliqué…

Alors, ces deux parti/e, féminin et masculin, ont la même origine : le verbe partir, mais qui au départ avait un sens différent de celui d’aujourd’hui, il voulait dire partager. 

Maille à partir

C’est le sens qu’il a gardé dans l’expression "avoir maille à partir"… Eh oui ! Si j’ai maille à partir avec vous, c’est que nous avons une querelle, un différend (différend avec un D, hein, celui qui est une dispute, pas celui avec un T qui exprime la différence), bref avoir maille à partir avec quelqu’un, c’est être en mauvais termes avec lui.

Or, dans cette expression, la maille n’a rien à voir avec le tricot, c’est la plus petite des pièces de monnaie, une piécette en cuivre de l’époque médiévale, et partir ne veut pas dire "s’en aller" mais “partager, séparer”. Avoir maille à partir, c’est donc devoir se partager une toute petite pièce de monnaie, ce qui est impossible… et qui on l’imagine génère des querelles. Bref, c’est ce verbe partir originel qui a donné la partie et le parti – et la part aussi, mais elle tout le monde sait l’écrire, ouf.

Il existe quelques trucs pour savoir si c'est parti ou partie. Pour certaines expressions, il suffit d’être malin et de rallonger un peu la sauce, de prolonger l’expression. Par exemple : prendre parti/e : on peut dire "j’aimerais que tu prennes mon parti", donc dans "prendre parti", parti est masculin. Idem avec "tirer parti", on peut dire “il faut que je tire le meilleur parti de ceci ou de cela”, donc ici encore c’est parti.

En revanche, prendre à partie, faire partie, avoir partie liée, être partie prenante, tout ça c’est LA partie. En gros, parti, au masculin, se trouve dans les expressions où il s’agit de faire un choix, prendre un parti, prendre parti, tandis que partie avec un E se trouve dans des expressions portant l’idée de faire partie ou de participer, et également au sens juridique (celui qu’on retrouve dans la partie civile).

Notez bien, parce que c’est rigolo, que prendre parti, c’est i, mais prendre à partie (c’est-à-dire s’en prendre à quelqu’un), c’est parti-ie.
Pour terminer, voici le corrigé de notre miniquiz : "J’aimerais prendre parti pour le parti dont tu fais partie, sans être vraiment partie prenante, car je crains d’être pris/e à partie par des adversaires qui chercheraient à en tirer parti." Dites-moi si vous avez fait zéro faute, amis des mots !

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