Orthographe : dans quel cas faut-il utiliser un trait d'union ?

Aujourd’hui, amis des mots, on va rendre justice à un tout petit signe, souvent négligé : le trait d’union, que le Larousse définit comme un "signe typographique ayant la forme d’un petit tiret que l’on met entre les éléments de la plupart des mots composés ou entre le verbe et un prénom postposé."

Les mots composés, il y en a des centaines en français, du siège-auto à l’appuie-tête, en passant par essuie-glace, belle-mère, grand-père, après-midi, Ile-de-France, Pyrénées-Atlantiques, Champs Élysées, Saint-Ouen, Saint-Brieuc, Saint-Flour, pousse-café, presse-citron, sèche-cheveux, crève-cœur, perce-oreille, trompe-l'œil, casse-pieds, casse-noisette, casse-bonbons, lave-vaisselle, lave-linge, micro-ondes, va-t-en-guerre, qu’en-dira-t-on, taille-crayon, arc-en-ciel, Jean-Pierre, Marie-Louise, dame-jeanne, etc. Un véritable inventaire à la Prévert !

Le dictionnaire évoque aussi le trait d’union "entre un verbe et un pronom postposé"… une façon un peu jargonneuse et compliquée de décrire quelque chose de simple. Les pronoms postposés, on les utilise tous les jours : ce sont des pronoms (je, tu, il, elle, nous, on…) qui, au lieu d’être comme d’ordinaire placés avant le verbe (il mange, elle dit, je t’aime), sont installé après : post-posés. C’est ce que l’on fait dans les questions, tout du moins à l’écrit, ou dans les récits (dit-elle, fait-on, penses-tu…). Là aussi, c’est trait d’union obligatoire.

Au XIIIe siècle, deux barres obliques entre les mots

On trouve les premières traces de quelque chose qui s’apparente à un trait d’union dès le grec ancien, une sorte de petite parenthèse horizontale en dessous de la ligne de texte, comme vraiment pour matérialiser une liaison. En hébreu, on remarque également dans les textes anciens un petit trait horizontal qui ressemble davantage à notre trait d’union moderne.

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Plus près de chez nous et de notre époque, on voit à partir du XIIIe siècle des traits d’union, mais ils sont représentés par deux barres obliques entre les mots. Enfin, dans le premier dictionnaire de l’Académie française, qui date de la fin du XVIIe siècle, le trait d’union prend son aspect et son usage actuels… en revanche, les règles d’orthographe ont changé : par exemple, il y avait alors un trait d’union à porte-feuille, qui s’écrit en un seul mot depuis la cinquième édition du dictionnaire, celle de 1798.

Dans la plupart des cas, les traits d’union servent à créer des mots nouveaux en se servant de mots existants. Quand on a l’idée d’inventer un truc qui sert à appuyer la tête, on va l’appeler comment ? Tiens, appuie-tête, fondé sur le verbe appuyer et sur le nom tête. Quand on invente une machine à laver la vaisselle, tiens, si on l’appelait lave-vaisselle ? Et celui qui a la brillante idée de créer un truc pour tirer plus aisément le bouchon de liège hors de la bouteille de chardonnay qu’on va déguster à l’apéro : pop… il appelle cela un tire-bouchon ! À la vôtre, amis des mots ! Avec modération quand même, hein ? 

Et les traits d’union aussi, avec modération, d’ailleurs. Car, si on en oublie souvent, on en met parfois là où il n’en faut pas. Avec leurs complices les majuscules, ils sont pourtant précieux pour distinguer certains mots à l’écrit. Exemple : si je parle de forêt noire en deux mots, il s’agit d’une forêt sombre. Si je mets un trait d’union, miam, ça devient un gâteau au chocolat (Donnez-moi une part de forêt-noire), mais attention, avec un trait d’union et des majuscules, la Forêt-Noire devient un nom propre, celui d’un massif montagneux d’Allemagne.

On met aussi souvent à tort des traits d’union aux fractions : trois quarts, deux tiers, etc. Trois-quarts ne prend de trait d’union que lorsqu’il s’agit d’un nom : un trois-quarts (quand c’est un manteau, par exemple). Si j’écris "les trois quarts du temps, je ne fais rien", c’est sans trait d’union. De même, on écrit "un tête-à-tête" avec des traits d’union, car alors c’est un nom, il y a même un article devant, mais si vous déjeunez ce midi EN tête-à-tête, alors attention, plus de trait d’union, car ce n’est plus un nom ! Allez, je vous laisse digérer tous ces petits traits… Bon appétit, amis des mots !

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21/12/2025 à 10:23 - 03m49s