La semaine dernière, nous avons évoqué cette drôle d’expression, "en huit", comme dans "samedi en huit", et on a vu qu’elle était à éviter si vous ne voulez pas louper la moitié de vos rendez-vous. Mais il y a quantité d’autres façons de parler du temps qui passe qui sont illogiques ou surprenantes. Par exemple, mon cousin Rodolphe me demandait l’autre jour pourquoi on dit "je ne vais pas attendre 107 ans". Pourquoi pas cent ans ? Ou mille ans ?
Il y a deux légendes autour de cette expression. La première la rattache à l’interminable guerre de Cent Ans, entre 1337 et 1453, qui si vous comptez bien n’a pas duré 100 ans, mais pas non plus 107 : ça fait 116 ans – justement, pourrait-il y avoir eu confusion entre les deux nombres, 116 et 107, dont la prononciation se ressemble ?
Pas impossible, si on pense à la force symbolique du chiffre 7, très présent dans notre culture : les 7 jours de la semaine, les 7 péchés capitaux, les bottes de 7 lieues.
Une autre histoire relie cette expression à la non moins interminable construction de Notre-Dame de Paris, qui a commencé en 1163, ça c’est sûr, mais dont il est difficile de dire quand elle a été terminée. Le Larousse dit qu’elle l’a été "pour l’essentiel vers le milieu du XIIIe siècle". Quoi qu’il en soit, les Parisiens ont jugé que ce chantier prenait des lustres – pour utiliser une autre expression du temps qui passe.
Et d’ailleurs, amis des mots, savez-vous quelle est la durée d’un lustre ? Pas si long que ça. Un lustre, c’est cinq ans ! Le mot vient du latin lustrum, qui désignait, nous apprend le Dictionnaire historique de la langue française du regretté Alain Rey, "un sacrifice expiatoire pratiqué à Rome tous les cinq ans".
Ah, et tenez, un autre mot du temps qui est souvent mal utilisé : naguère. Contrairement à ce que l’on pense souvent, en réalité, naguère désigne une période relativement "proche de la nôtre", nous détrompe l’Académie française dans la rubrique "bonheurs et surprises" de son site Internet. On évitera donc de l’employer au sens d’autrefois, anciennement.
Il s’agit en fait d’une réduction de l’expression "il n’y a guère" (sous-entendu, guère de temps). En revanche, le mot jadis "renvoie à un temps très lointain". "Le sens de ces adverbes s’explique par la manière dont ils sont composés, précise l’Académie. Dans jadis, on retrouve “ja”, la forme ancienne de déjà, et “dis”, qui veut dire "jours", et que l’on retrouve aussi dans dimanche, lundi, mardi, etc. Jadis, c’est donc “il y a déjà des jours et des jours”.
Et tenez, pour fini