La société était devenue un emblème de la Silicon Valley dans les années 2010 en commercialisant des tests de recherche ADN à des fins thérapeutiques. L'annonce de sa faillite en mars dernier avait suscité une onde de choc : qu'allaient devenir les millions de données génétiques collectées sur ses clients au fil des ans ?
Le patrimoine biotechnologique de 23andMe a trouvé preneur ce lundi 19 mai. La banque de données contenant les profils génétiques de plus de 15 millions de personnes va être rachetée par le laboratoire pharmaceutique Regeneron pour 256 millions de dollars. Le groupe américain a été choisi par la justice dans le cadre du rachat de la quasi-totalité des actifs de 23andMe. L'opération est désormais soumise à la validation du tribunal des faillites et des autorités réglementaires et devrait être finalisée au troisième trimestre 2025.
Fondé en 2006 par Anne Wojcicki, 23andMe a conquis des millions d’individus avec une promesse simple et séduisante : en échange d’un échantillon de salive et d’une centaine de dollars, chacun pouvait découvrir ses origines et ses prédispositions génétiques. L'engouement du public a permis à la jeune pousse de s'imposer comme un fleuron de la biotech, un temps valorisé à 6 milliards de dollars mais jamais rentable, et surtout de bâtir un empire de données inédit, souvent au détriment de la vie privée. Un piratage massif a d'ailleurs exposé les informations sensibles de près de 7 millions de clients en 2023, dont au moins 12.000 Français.
Les conditions d'utilisation du service, interdit en France, prévoyaient explicitement que les informations collectées dans le cadre des tests ADN pouvaient être réutilisées, y compris en cas de vente ou de fusion. Le laboratoire pharmaceutique Regeneron s'est engagé à "protéger les données de 23andMe avec des normes de confidentialité élevées" et à les utiliser pour "réaliser des découvertes bénéfiques pour la science et la société".
Malgré ces garanties, la perspective d'un transfert massif de ces données à une entreprise privée soulève des inquiétudes légitimes. La CNIL, comme plusieurs procureurs américains, a appelé les utilisateurs à la vigilance et rappelé que chaque client peut et devrait demander la suppression de ses données et de son échantillon biologique. D'après l'association DNA Pass, près d'un million et demi de Français ont déjà effectué un test ADN à des fins généalogiques, avec 23andMe ou un service concurrent, et environ 150.000 sauteraient le pas chaque année, malgré l'interdiction de ces dispositifs dans l'Hexagone.
La valeur des données génétiques collectées par 23andMe dépasse largement le simple cadre médical. Les profils ADN en question ne se limitent pas à des séquences de gènes, ils mêlent identité civile, coordonnées personnelles, habitudes de vie, questionnaires de santé, arbres généalogiques et relations de parenté, des renseignements glanés au gré des questionnaires remplis par les clients. S'y ajoutent des informations phénotypiques, comme la couleur des yeux et la morphologie et des prédispositions à certaines maladies. Le patrimoine génétique engage aussi les proches des clients, souvent à leur insu. Ces informations peuvent trahir des secrets de vie ou annoncer l'arrivée d'une maladie. Détournées à des fins commerciales, elles pourraient aussi éveiller des soupçons chez des assureurs ou des employeurs, redoutent les experts.
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