Le recours à l'oxycodone, un puissant antidouleur, est de plus en plus répandu en France. Cette substance, utilisée dans des médicaments comme l'Oxycontin, est à l'origine de la grave crise des opioïdes aux États-Unis, qui a causé la mort de 600.000 personnes en 20 ans. Si la France n'en est pas encore à ce stade, la Société française de pharmacologie (SFPT) a mis en garde sur la nette hausse du recours à cet opiacé. "Ces dernières années, sa prescription en France suit une progression inquiétante alors qu’elle ne présente pas d’avantage pharmacologique par rapport à la morphine", écrit la SFPT dans un avis publié lundi 22 mai sur son site internet. Son implication dans les décès toxiques par antalgiques a ainsi quadruplé entre 2013 et 2017. En 2019, 23 décès ont été attribués à cette substance.
L'oxycodone, qui permet de lutter contre des douleurs sévères, notamment après une opération, présente un fort danger d'addiction. La Société française de pharmacologie juge en outre que la morphine, qui appartient aussi à la famille des opioïdes, présente moins de risques. "Il n’y a aucun argument pour préférer la primo-prescription d’oxycodone par rapport à la morphine", tranche la SFPT. En France, l'oxycodone est presque autant consommé que la morphine.
Le recours à cette substance est particulièrement inquiétant dans deux régions. En Nouvelle-Aquitaine, la consommation d'oxycodone a augmenté de 25% en cinq ans, selon le professeur Francesco Salvo. "C’est particulièrement fort chez nous, car ailleurs la progression est plus raisonnable, de l'ordre de 1 à 2% par an", s'est inquiété le responsable du centre régional de pharmacovigilance de Bordeaux, interrogé par France 3. Autre région confrontée au problème : l'Occitanie, qui comptait 7 consommateurs d'oxycodone pour 1.000 habitants contre une moyenne nationale de 5,7 pour 1.000 habitants, toujours selon France 3.
L'Agence nationale du médicament avait déjà alerté sur les risques liés aux opioïdes en 2019. "Le nombre de décès liés à leur consommation a augmenté de 146 %, entre 2000 et 2015, avec au moins 4 décès par semaine", écrivait l'ANSM. Aux États-Unis, les laboratoires et les distributeurs pharmaceutiques sont accusés d'avoir, à partir de 1996, fait la promotion agressive d'antidouleurs aux opiacés comme l'oxycodone. Leur dangerosité a éclaté au grand jour au milieu des années 2010 avec une explosion des overdoses liés aux opiacés, qu'il s'agisse de médicaments prescrits ou de drogues de synthèse comme le fentanyl.