Le compte est impossible à faire entre une partie des LR qui refusent de se prononcer, ceux qui n'ont pas encore décidé entre voter "contre" ou s'abstenir, et entre un ou deux qui vont peut-être rater leur train ou avoir envie d'aller aux toilettes au moment du vote. On ne peut pas savoir de quel côté ça va basculer.
C'est serré, on est dans un flou total. Ajoutez à cela la manière dont le gouvernement a alimenté l'hypothèse du 49.3, tout en disant qu'il ne voulait pas finir avec ça. Le 49.3 c'est, je le rappelle, l'adoption d'un texte sans vote. La communication du gouvernement sur le 49.3 a été complètement erratique.
On a entendu Olivier Véran dire que "le 49.3 n'est pas un tabou mais pas non plus une option". Mais pour Olivier Dussopt, "il serait stupide de l'écarter." Et dans un magnifique exercice de "et en même temps", Gabriel Attal a affirmé : "Ce n'est pas notre piste même si cet article figure dans la Constitution." Il y en a qui ont le chic pour se prendre les pieds dans le tapis.
C'est régulièrement ce qu'il se passe en macronie depuis qu'Emmanuel Macron est au pouvoir. Cela flotte et le président finit par descendre dans l'arène. C'est ce qu'il a fait lundi 13 mars en s'invitant à une réunion de la majorité. Et en venant dire qu'il était convaincu qu'il y avait une "majorité solide" et qu'il fallait maintenant obliger les Républicains à montrer leur jeu.
Le président joue au poker et il joue le tout pour le tout. Il veut pousser chacun à prendre ses responsabilités. Il pense que chez certains LR, l'envie de le forcer à dégainer le 49.3 est plus forte que tout. Avec un 49.3, on ne parle plus des divisions chez les LR, on n'a pas à se justifier auprès de ses électeurs. C'est pratique un 49.3 : c'est l'affaire du gouvernement, pas des Républicains.
Emmanuel Macron veut donc pousser les Républicains à faire la démonstration que ce sont des gens cohérents, ayant toujours porté cette réforme. Et qu'ils ne sont pas en train de faire un petit tour de passe-passe politique.
Il y a liberté de vote. Et même si on fait passer des consignes, c'est très aléatoire. Laurent Wauquiez, par exemple, assure qu'il va inciter ses proches qui siègent à l'Assemblée nationale à voter pour le texte, alors qu'ils sont réticents. Pas sûre que cela marche. Le risque est donc grand.
Emmanuel Macron a conçu cette réforme pour qu'elle soit acceptable par les LR. Depuis le début, Élisabeth Borne a construit une majorité avec les LR à la demande du président. Donc Emmanuel Macron a décidé de miser sur le vote des Républicains pour avoir une majorité. Il fait "tapis" comme on dit. C'est un gros coup de poker.