ÉDITO - Loi immigration : un micmac qui tourne à la prise de tête pour Gérald Darmanin

Le Sénat a voté la loi immigration dans une version plus dure que celle présentée par le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. Est-ce qu'il a une chance de trouver une majorité lorsque la loi arrivera à l'Assemblée, début décembre ? C’est la question qui doit donner quelques sueurs au ministre parce que plus ça va, moins ça va.

Je rappelle pour ceux qui n’ont pas tout suivi, parce qu’on doit en être à l’épisode 8 de la saison 2 de la loi immigration, qu’au départ le gouvernement s’était dit qu’il valait mieux commencer par le Sénat parce qu’il serait plus facile de trouver un compromis avec les sénateurs de la droite et du centre, contrairement à l’Assemblée où l’opposition de droite est plus frontale. 

Ça, c’était sans compter ce qu’on appelle "la surenchère" qui est souvent de la partie en politique, mais aujourd’hui plus qu’avant.

L'épreuve de l'Assemblée pour Gérald Darmanin

Résultat : la réforme qui devait reposer sur deux jambes ne tient plus que sur une jambe, la droite, elle penche même très nettement à droite, après son passage au Sénat : expulsions facilitées, resserrement des critères de regroupement familial, durcissement du droit du sol, conditionnement des allocations familiales et des aides au logement à 5 ans de résidence, suppression de l’AME, l’aide médicale d’État, qui devient une aide médicale d’urgence et régularisation des sans-papiers dans les métiers en tension "au cas par cas", c’est le préfet qui dira oui ou non. 

Cette loi peut-elle être adoptée en l'état ? C’est là où on espère pour Gérald Darmanin qu’il a quelques notions de tricot, une maille à l’endroit, une maille à l’envers parce qu’il va falloir repriser. Parce qu’à l’Assemblée, il y a les députés LR qui attendent le ministre au tournant (leur ancien collègue) et qui trouvent que le texte du Sénat ne va pas assez loin, on retrouve notre "surenchère".

D’ailleurs, dès le début, les députés LR ont dit qu’ils ne voteraient pas et qu’ils déposeraient une motion de censure. Ils sont extraordinaires les LR parce qu’ils exigent des mesures qu’ils n’ont pas fait voter auparavant. L’AME, ils auraient pu la supprimer du temps de Nicolas Sarkozy.

L'hypothèse la plus probable est que ce texte ne passe pas à l’heure où l’on se parle

Donc, il y a d’un côté les LR et de l’autre, la majorité. Et là, double difficulté, l’aile gauche de la macronie ne veut pas du texte du Sénat, trop dur. Alors que les amis d’Édouard Philippe, sont très favorables au texte du Sénat, ils sont de droite, eux. Gérald Darmanin doit se sentir bien seul.

D’autant qu’il n’a pas vraiment le soutien de la première ministre Élisabeth Borne. L'hypothèse la plus probable est que ce texte ne passe pas à l’heure où l’on se parle. Surtout que Gérald Darmanin a dit qu’il était opposé au 49.3. Alors, les négociations vont commencer en coulisses, il reste encore un peu de temps avant le 11 décembre. Mais ça montre les limites de la majorité relative. 

Sur des textes qui font consensus, on peut trouver des accords, mais sur un texte explosif comme l’immigration, c’est comme jouer à la roulette russe.

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