ÉDITO - Les ordonnances d'Édouard Philippe, "une bonne idée", selon Étienne Gernelle

Édouard Philippe m'a convaincu sur un point en tout cas. Le candidat à la présidentielle a annoncé une méthode simple : le sprint ! Référendum d’emblée, en même temps que les législatives : sur les retraites, et sur une règle d’or budgétaire. Et puis des ordonnances sur la santé, la justice, et l’éducation ! Ordonnances dont l’habilitation pourra être donnée, assure-t-il, par référendum. Bref, tout, tout de suite. Faire le plus dur en tout début de mandat, et au pas de course. Et je vais vous dire, il a raison sur cette méthode.

Alors Édouard Philippe a cité dimanche l’exemple du général de Gaulle, qui a utilisé les ordonnances dès les premières semaines de son retour au pouvoir, en 1958, pour faire passer un très gros paquet de réformes sur tous les sujets. Or, c’est la dernière période de réformes massives que la France a connu. 

Mais mon petit doigt me dit que sa source d’inspiration est plus proche, et se nomme Alain Juppé. N’oublions pas que c’est un juppéiste, Édouard Philippe. Or, Alain Juppé préconisait, lors de la campagne des primaires de droite, en 2016, de réaliser l’essentiel de ses réformes par ordonnances et dès le début de son mandat. 

Les Présidents sont toujours rattrapés par les problèmes

Mais au fond pourquoi, pourquoi tout tout de suite ? Parce qu’ensuite, on est toujours rattrapé par les problèmes, les blocages, les corporatismes qui reprennent du poil de la bête, ou des événements imprévisibles mais paralysants. Alain Juppé a connu l’enlisement en 1995, il connaît la chanson. Alors il n’a pas gagné la primaire en 2016, mais la suite lui a donné raison, et Emmanuel Macron aurait été bien inspiré de le copier sur ce point.

Emmanuel Macron a bien utilisé des ordonnances en 2017, principalement sur deux sujets : le marché du travail -  les fameuses ordonnances Pénicaud  - et sur la réforme de la SNCF. Et ce sont d’ailleurs ses deux grandes réformes, ses deux réussites. Et en tout début de mandat. Et puis après, les gilets jaunes sont passés par là, puis le Covid, et tout cela a sonné le glas de ses ambitions réformatrices. À part, il est vrai, sur l’assurance chômage. 

Emmanuel Macron a été trop sûr de lui : il a cru qu’il pourrait réformer pendant cinq ans. C’était une erreur. Et en 2022, il a renouvelé l’erreur, en tardant à engager la réforme des retraites. Résultat, ce fut le bourbier que l’on sait. En cela, la méthode Philippe, c’est le début de son droit d’inventaire par rapport à Emmanuel Macron.