Il avait tout pour lui. Trop peut-être. Alexandre Despallières a toujours considéré que tout lui était dû : l’amour, l’argent et bien sûr, la gloire. Sa mère, Monique, en est folle, elle lui serine qu’il réussira dans la vie, il est si beau qu’on lui passe tout. Il vole les cartes de crédit de son père, signe des chèques en douce. La famille ferme les yeux. C’est Alex ! Intelligent, amusant et cynique selon son ex-belle-soeur.
Mais au début des années 80, le destin déraille : il est séropositif. Il n’a que 16 ans, les médecins lui donnent six mois à vivre, c'est du moins ce qu’il racontera plus tard. Plus que jamais, il devient le centre du petit monde familial. Rien ne doit le contrarier.
Il en profite pour quitter le lycée. Il est pourtant loin d’être idiot, il s’intéresse à la psychanalyse, à la littérature russe. Mais il n’a jamais aimé travaillé, un vrai fainéant, il le dit lui-même.
Lui, ce qu’il veut, c’est profiter. Profiter de la vie qui s’annonce courte, profiter de tous ces gens éblouis par sa belle petite gueule et sa silhouette longiligne, quelque part entre Delon et les chanteurs du Top 50. Il sort beaucoup, il est de toutes les fêtes, carbure à la coke avec la bénédiction de Monique, il souffre, le pauvre, il en a besoin. Son charme vénéneux fait des ravages et il sait en faire payer le prix.
Il plaît beaucoup aux messieurs d'un certain âge. La maison de Bois-Colombes prend vite des allures de maison de passe… Alexandre y ramène ses vieux amants fortunés, ses conquêtes vues à la télé, des hommes politiques, des chanteurs, des producteurs viennent prendre le café chez Monique qui frétille de fierté.
Le père, Marcel, est moins emballé : "Ton gosse est un monstre, et c’est toi qui l’a créé", c’est ce qu’il lui dit. De fil en aiguille, le voilà qui enregistre un 45 tours. Il a 19 ans, la coupe de cheveux à la mode, cheveux longs dans la nuque. Le titre est prémonitoire : L'amour à mort.
L'existence d'Alexandre Despallières est semée de paillettes, de liasses de cash et de morts suspectes… Celle de Peter Ikin va sonner la fin de la belle vie : passage par la case prison. Les psychiatres qui l’examinent en 2011 décrivent un homme colérique mais séducteur.
Après cet épisode, Alexandre Despallières se range. Il épouse un physicien et, avec lui, il monte K3OPS, une société censée transformer les ondes électromagnétiques en électricité. Tout ça lui vaudra une invitation dans les jardins de Matignon en 2017, pour une cérémonie à la gloire de la French Tech. Naturellement, il s’empresse de poster une vidéo sur Twitter.
"Un lundi très ordinaire ; K3OPS à Matignon avec Édouard Philippe". Trop fier de pouvoir citer le Premier ministre, même s’il n’est pas à ses côtés. Ce sera son ultime moment de gloire, jusqu’à sa mort, juste avant son procès… Pour la postérité, il reste innocent… et on se souviendra de lui. Objectif atteint.
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