Affaire Vanessa Lagesse : le cold case qui hante encore l'île Maurice

C'est un meurtre qui hante l'île Maurice et ses plages paradisiaques depuis 24 ans. Le 10 mars 2001, Vanessa Lagesse, 32 ans, riche héritière de l’île, est retrouvée morte dans la baignoire de son luxueux bungalow à Grand Baie. Le corps, à moitié nu, est marqué par une violence extrême : visage tuméfié, côtes fracturées, colonne vertébrale disloquée. Une corde à linge autour du cou tente maladroitement de faire passer le meurtre pour un suicide.

L’enquête s’oriente alors vers Bernard Maigrot, 39 ans, riche entrepreneur et amant de la victime. L’homme, marié et père de famille devient le principal suspect.

Un mois et demi plus tard, il est arrêté en caleçon à son domicile. Interrogé sans relâche, il finit par expliquer qu'elle le harcelait, il voulait rompre une bonne fois pour toutes. Il signe des aveux… qu’il déclare ensuite extorqués sous la menace.

J'ai été kidnappé et torturé par la police...Frappé aux parties intimes... Je n'avais pas d'autre choix que de fabriquer une histoire pour me sortir de là.

Bernard Maigrot

"Il va être amené à faire ce qu'on a appelé des aveux, mais qui n'ont jamais été considérés comme étant de véritables aveux (ndlr : puisque qu'ils ont été) extorqué sous la torture", avance Maître Patrice Reviron au micro de RTL. 

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Il ajoute : "Il s'est servi de coupures de presse pour essayer de faire plaisir, mais sans que ça corresponde à son expression et à son français. On comprend qu'on lui a dicté des réponses qui ne correspondaient à rien." Inculpé puis libéré, Maigrot reste le suspect numéro un.

L'ADN remis en question

Vingt-trois années passent après la mort de Vanessa Lagesse sans avancées notables jusqu'au 20 mai 2024. Bernard Maigrot est alors jugé devant une cour d’assises. Il se présente au tribunal de Port-Louis, costume sombre, visage fermé, et plaide non coupable. Le procès s’appuie sur une pièce centrale : l’ADN de l'ancien amant, retrouvé sur deux draps appartenant à la victime. 

Mais ce que l’accusation considère comme une preuve clé est aussitôt fragilisé. L'expert en génétique admet ne pas pouvoir expliquer à quel moment l’ADN s’est retrouvé là. L’accusé, lui, rappelle avoir eu un rapport sexuel avec la victime quatre jours avant sa mort, ce qui pourrait justifier une présence d’ADN par transfert. Mais malgré ces explications, Bernard Maigrot est condamné à quinze ans de prison. 

Le mystère perdure

Ashley Victor, journaliste, se souvient de l'évènement : "Vu le passé colonial de Maurice, il y a un certain ressentiment social. C'est l'homme puissant qui va s'en sortir, qui a des contacts, qui a de l'argent. L'opinion publique pensait que Bernard Maigrot était coupable et ça, c'était depuis le début de l'enquête." 

L'ancien amant fait appel. Le 25 mars 2025, l'affaire connaît un nouveau rebondissement avec l'annulation de sa condamnation. Selon les juges, aucune preuve fiable ne permet d’affirmer que Bernard Maigrot se trouvait chez la victime au moment du meurtre. 

Aujourd’hui, l’affaire Vanessa Lagesse demeure un mystère non résolu. Un cold case qui hante encore l’île Maurice.

Les invités de "L'Heure du Crime"

- Maître Patrice Reviron, avocat au barreau d’Aix-en-Provence et est intervenu en qualité d’expert pour Bernard Maigrot et ses avocats. 
- Ashley Victor, journaliste et chef d'édition à l’île Maurice pour Radio One (radio locale).