Prince Andrew : va-t-il un jour être jugé dans l'affaire Epstein ?

Le 17 octobre 2025, le roi Charles III prive de sa qualité de prince son frère Andrew, 65 ans. Celui-ci perd immédiatement tous ses titres : duc d'York, comte d'Inverness ou encore chevalier de l'ordre de la Jarretière... Celui qui était le fils préféré de la reine Elizabeth II ne pourra plus résider au Royal Lodge, à quelques kilomètres du château de Windsor. Soupçonné dans l'affaire Epstein, il sera désormais appelé Andrew Mountbatten Windsor.

Pour comprendre cette affaire, il faut remonter quelques années en arrière. Le 1er mai 2009, le tribunal de Miami, en Floride, enregistre une plainte pour abus sexuels, exploitation sexuelle, encouragement à la prostitution d'une mineure. Sous anonymat, une Américaine de 26 ans, Virginia Giuffre raconte comment pendant presque trois ans, entre ses 15 et 17 ans, elle a été une victime du milliardaire Jeffrey Epstein.

Il faut ensuite attendre février 2011, alors que les accusations de pédophilie enflent autour de l'Américain, pour que le journal britannique The Mail on Sunday publie une photo qui fait le tour du monde : on y voit le prince Andrew tenir par la taille une jeune fille blonde de 17 ans au nombril dénudé. La photo a été prise le 10 mars 2001 par Jeffrey Epstein en personne, dessus il s'agit de Virginia Giuffre. Entendue par la justice américaine, celle-ci confirme alors avoir eu des relations sexuelles avec le fils préféré de la reine.

"La publication de cette photo, c'est l'explosion médiatique, le début de la fin pour le prince Andrew", explique Jérôme Carron, grand reporter pour le magazine Point de Vue, dans l'Heure du crime sur RTL. Tant qu'il était dans le déni permanent, cela fonctionnait vaguement mais le jour où apparaît la photo, tout s'écroule".

Un accord monumental pour éviter un procès aux États-Unis

L'enquête se poursuit et Jeffrey Epstein plaide coupable lorsqu'il est inculpé de trafic sexuel sur mineures en 2019, avant d'être retrouvé pendu dans sa cellule du Correctionnal Centre de New York, dans des circonstances intrigantes. La pression s'accentue alors sur le prince Andrew, qui continue d'affirmer - parfois avec maladresse - qu'il n'a jamais abusé de Virginia Giuffre ou de qui que ce soit.

À écouter aussi

Le couronnement de Charles III

Les différentes étapes du couronnement (16/16)

27/05/2025 à 02:30 - 12m03s

Le 9 août 2021, la femme porte nommément plainte pour abus sexuels contre la figure de la famille royale, qui continue à se défiler. Qu'importe croit-on, lorsque le juge Kaplan autorise l'ouverture d'un procès qui pourrait entrainer la condamnation d’Andrew outre-Atlantique. Mais patatras. Le procès n’a finalement pas lieu car le prince conclut un accord avec la plaignante : une transaction, avec un dédommagement avoisinant les 12 millions de livres (quelque 14,5 millions d'euros), est signée...Du jour au lendemain, au grand regret du tribunal de New York,  les poursuites contre le prince cessent.

"Il fallait à tout prix éviter un procès en bonne et due forme aux États-Unis parce que cela aurait porté un préjudice grave à la réputation de la famille royale dans son ensemble. Elizabeth II paie donc de sa propre poche l'arrangement financier", avant les célébrations de son jubilé de platine en juin de la même année, rappelle sur RTL Marc Roche, ancien correspondant pour Le Monde à Londres et auteur du livre : Ma vie chez les Windsor – les derniers secrets de Buckingham, aux éditions Albin Michel.

Le suicide de Virginia Giuffre et son livre posthume replacent Andrew dans l'oeil du cyclone

L'affaire est finalement relancée trois ans plus tard. Le 25 avril 2025, la famille de Virginia Giuffre, 41 ans, annonce que celle-ci s'est suicidée en Australie. "Elle a mis fin à ses jours après avoir été longtemps victime d'abus sexuels et de trafic sexuel", indiquent ses proches. La plaignante laisse derrière elle ses longues dépositions devant la justice américaine mais aussi un livre posthume... Le récit effarant de ses années sous la coupe de Jeffrey Epstein, et sa compagne Ghislaine Maxwell. De quoi cibler largement Andrew.


Début 11 octobre, le Daily Mail publie ensuite les SMS inédits du prince, qui avaient été exhumés par les enquêteurs américains. Le fils de la reine Elizabeth a toujours répété qu’il n'avait jamais eu de relation sexuelle avec la plaignante. Il avait aussi affirmé avait coupé les ponts avec Jeffrey Epstein. Ce sont des preuves qu'il a menti. Le 28 février 2011, lendemain de la sortie de la fameuse photo où il enlace Virginia Giuffre, le prince faisait d'ailleurs cet aveu cynique à son ami : "Ne t'inquiètes pas pour moi...Je suis tout autant inquiet pour toi, il semblerait que nous soyons dans le même bateau et que nous devons surmonter cette épreuve".

Aux États-Unis, l'enquête Epstein est officiellement close depuis l'été 2025. Mais des magistrats et de nombreux avocats sont favorables à une nouvelle demande d'audition d'Andrew Mountbatten Windsor. Le dossier sur son cas ne serait pas purgé, l'intéressé ayant toujours refusé de répondre aux questions des juges. "Les Britanniques sont dégoûtés de cette affaire et ils estiment qu'Andrew ne peut pas échapper à la justice, qu'il doit rendre des comptes", explique Marc Roche dans L'heure du crime. Autrement dit, les déboires d'Andrew avec la justice, américaine ou britannique, ne sont probablement pas terminés.

Les invités de "L'Heure du Crime"

- Jérôme Carron, grand reporter pour le magazine Point de Vue.
- Marc Roche, ancien correspondant pour Le Monde à Londres et auteur du livre : Ma vie chez les Windsor – les derniers secrets de Buckingham, aux éditions Albin Michel.