ÉDITO - Guerre en Ukraine : "Vladimir Poutine n'a renoncé à rien du tout", analyse Étienne Gernelle

Vladimir Poutine et Emmanuel Macron ont échangé par téléphone, ce mardi 1er juillet, pendant deux heures. C'est une première depuis 2022. Faute de livrer assez d'obus et de canons à l'Ukraine pour lui permettre de tenir face à Vladimir Poutine, Emmanuel Macron téléphone au Kremlin. Plusieurs sujets ont été évoqués, mais il a surtout été question de l'Ukraine. 

Certes, l'Iran a été évoqué durant ce coup de fil, et il est vrai que la Russie a un rôle à jouer pour persuader Téhéran de renoncer au nucléaire militaire. On a un intérêt commun dans cette affaire, mais le conflit le plus immédiatement dangereux pour nous, c'est bien sûr celui qui se déroule en Ukraine, et on ne peut pas interpréter ce coup de fil autrement. Or, de ce point de vue, cette conversation est plutôt un signe de faiblesse, de réalisme, diront certains, ce qui est une manière plus positive de dire les choses, mais quand même de faiblesse.

Emmanuel Macron attaché à l'intégrité territoriale de l'Ukraine

Cela ne veut pas obligatoirement dire qu'Emmanuel Macron est prêt à lâcher du lest face à Vladimir Poutine. En matière diplomatique, il y a des rites. Les deux protagonistes du coup de téléphone font savoir après coup ce qu'ils ont dit.

Alors, le président français a rappelé son attachement à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui est un peu un vœu pieux, puisque 20% de son territoire est occupé. Le président russe, lui, a souligné avec sa formule habituelle qu'il voulait s'attaquer "aux causes profondes de la guerre". Pour lui, la cause profonde, c'est une Ukraine indépendante, libre et notamment libre de se tourner vers l'Ouest. Concrètement, Vladimir Poutine n'a renoncé à rien du tout. Ce qui a changé, c'est que l'Europe est seule.

Ce mardi, les États-Unis ont aussi fait savoir qu'ils renonçaient à livrer les armes promises par Joe Biden à l'Ukraine. Cela concerne notamment des missiles patriotes, mais pas aussi des obus et des missiles lancés depuis les F-16. Durant les premiers mois cette année, l'Europe a réussi à remplacer intégralement l'aide militaire américaine manquante. Selon le Kiel Institute, qui recense les aides à l'Ukraine depuis le début du conflit, l'Europe a dépassé, cette année, en cumul, les États-Unis depuis 2022. 

Vladimir Poutine n'a pas changé d'avis

L'Europe est donc montée en puissance, sauf que ça ne va pas assez vite par rapport au désengagement américain, aussi bien pour la défense de l'Ukraine, mais aussi de l'Europe elle-même. Les États-Unis envisagent de retirer 80.000 hommes du sol européen. Les Européens sont fébriles, ce qui explique aussi pourquoi ils se sont autant aplatis et humiliés devant Donald Trump lors du dernier sommet de l'Otan.

Emmanuel Macron, qui avait longtemps parlé avec Vladimir Poutine, avait fini par y renoncer fin 2022, convaincu que le maître du Kremlin tournait en boucle, qu'il n'y avait plus rien. Vladimir Poutine n'a pas changé de disque sur l'Ukraine. Ce qui a changé, c'est que l'Amérique est en train de déserter.