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"Un accélérateur de croissance" : comment le phénomène des "kidultes" dope le marché de Noël

Jeux de brique, cartes Pokémon, figurines… Les adultes sont de plus en plus nombreux à s'offrir des jouets, jusqu'à dépenser parfois sans compter. Avec leur pouvoir d’achat, ils deviennent une cible privilégiée des fabricants.

Image d'illustration, boites de Lego dans un magasin de jouets

Crédit : SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Juliette Vignaud

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Des jouets pour les petits et les grands. Alors que le réveillon de Noël approche à grands pas, les adultes seront très nombreux à déballer leurs cadeaux tant désirés : jeux de construction, cartes Pokémon, figurines… 

Depuis plusieurs années, le phénomène "kidulte" - néologisme issu de la contraction de kid et adult en anglais - prend de l'ampleur, jusqu'à doper le marché des jeux. En 2024, ils comptaient pour 29% du chiffre d'affaires du secteur du jouet en France, contre seulement 15% il y a dix ans. Cette année, ils représentent 31% de la part de marché du secteur.


"Ils représentent un nouvel accélérateur de croissance", confirme la coopérative U, à RTL.fr. Le 7 novembre dernier - journée traditionnellement promotionnelle dans l'ensemble de ses magasins - la coopérative fait part de "très gros volumes de vente", grâce à Barbie, l'indétrônable en tête, puis Lego, en deuxième, "grâce à sa diversification vers les adultes".

Dans les magasins, les jeux de construction pour adultes prennent autant d'espace, si ce n'est plus, que ceux pour enfants. Ils sont plus sophistiqués, plus chers aussi. Parmi les marques plébiscitées, Lego occupe une place de choix. "Les adultes représentent désormais un public incontournable", confirme la directrice de la marque, Camille Thorneycroft, pour RTL.fr. 

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En 2025, Lego compte 170 références pour adultes, sur 842, soit environ 20% du catalogue. En 2025, les produits pour adultes représentent un peu plus d'un tiers du total des ventes (35%). Et de constater : "On observe des pics de croissance à chacune des grandes occasions de l'année, mais également une progression continue en dehors de ces temps forts."

Les marques surfent sur la nostalgie

Face à la baisse des ventes liée à la démographie et à l'attrait croissant des jeunes pour l'électronique, les marques misent de plus en plus sur les adultes, avec des gammes conçues pour raviver leurs souvenirs d'enfance, notamment à travers des licences comme Star Wars. "Il y a dix ans, lorsque de nouveaux films sont arrivés au cinéma, je me suis intéressé aux sets proposés par Lego sur cet univers qui me fascine", rapporte Pierre Mollé, ancien gagnant Lego Masters, l'émission dédiée sur M6.

Pour le passionné, les jeux de brique représentent une "manière de laisser sa créativité s'exprimer". Selon lui, c'est aussi un moyen de se "reconnecter à son enfance, et de se relaxer en se déconnectant de tous les tracas du quotidien". "C'est apaisant de se poser dans le calme après une longue et stressante journée de boulot", confirme Colin Gérard, connu sous le nom de The laser symphony sur TikTok. Pour le créateur de contenu, les Lego apporte "relaxation et nostalgie" au quotidien.

@the.laser.symphony Réponse à @gab% ♬ son original - The laser symphony

"Depuis l'âge de 4 ans, je joue au Playmobil. J'en ai toujours eu à mes anniversaires et à Noël. Aujourd'hui, je suis passée à un stade de collectionneur", raconte Yoan Castel. Une casquette qui s'est renforcée avec l'ouverture de son compte Instagram Playmobil Castel en 2015, le profil dédié le plus suivi au monde avec 32.000 abonnés. Une passion qu'il transmet aussi à ses enfants, âgés de 3 et 5 ans, et dont il se dit "fier". "Ce sont des moments d'échange, de partage, des souvenirs", souligne-t-il.

Et ces profils se retrouvent désormais dans toutes les générations. "J'ai 63 ans et je rejoue au Lego, j'en ai eu étant petit et je retrouve la passion", atteste Claude, un auditeur sur RTL Midi. 

Les marques surfent ainsi sur la vague de la nostalgie. "Si à l'origine il s'agissait principalement de passionnés nostalgiques de leur enfance, il inclut aujourd'hui une population beaucoup plus large et diversifiée", nuance Camille Thorneycroft, directrice de la marque Lego, pour RTL.fr.

Les adultes recherchent non seulement des expériences créatives et ludiques, mais aussi des produits qui correspondent à leurs passions, à leurs centres d'intérêt ou à leur désir de collectionner

Camille Thorneycroft, directrice de la marque Lego

Des dépenses sans compter

Le kidulte est un client fidèle, mais surtout passionné, prêt à dépenser sans compter, d'autant plus qu'il consomme toute l'année. Un consommateur que les fabricants ciblent désormais ouvertement, conscients que ces passionnés n'hésitent pas à investir dans des gammes premium ou des éditions limitées. "Le public adulte se souvient de ses jouets de jeunesse et dispose d'un certain pouvoir d'achat. Il est donc capable de mettre des sommes importantes pour des jouets", affirme Grégory Caret, de UFC-Que choisir. 

Les boîtes de Lego sont en effet de plus en plus onéreuses, avec un montant pouvant atteindre les 1.000 euros pour un modèle spécial issu de la licence Star Wars. "Le prix à la pièce est le même mais il y a beaucoup plus de pièces", rapporte l'association de consommateurs. Autrement dit, les tarifs grimpent, notamment avec les licences et les modèles très détaillés Et ce positionnement séduit un public adulte moins contraint dans ses dépenses que pour des jouets destinés aux enfants.

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Lego, BookNook, Smart Games : ces jeux qui plaisent... aux adultes

00:04:00

"Un adulte, quand c'est sa passion, il peut mettre des sommes très importantes et peut perdre toute notion de valeur", martèle l'association de consommateurs. "Je n'ai pas peur de dépenser plusieurs centaines voire milliers d'euros dans des sets", confirme Pierre, le gagnant de Lego Masters, même s'il achète souvent que des pièces à l'unité pour ses propres créations. Avant d'être créateur de contenu, Colin Gerard, avait déjà dépensé 500 euros dans une boîte.

À l'époque, on achetait une à deux boîtes par an, et c'était toujours un grand moment de plaisir et de partage en famille

Colin Gerard, The laser symphony

"Je ne me limite pas à un budget. J'ai déjà acheté une boîte rare de Playmobil, à 2.200 euros, à un collectionneur à l'étranger", indique Yoan Castel. Pour autant, son budget annuel de Playmobil, estimé aux alentours de 5.000 euros, n'a pas de conséquences sur celui destiné à ses enfants. Ces investissements, loin d'être isolés, confirment ainsi la tendance kidulte, devenue moteur du marché du jouet.

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