Avec son projet de budget 2021, le gouvernement confirme la suppression progressive de la taxe d'habitation pour les plus aisés. Il s'agit des contribuables qui gagnent, pour un célibataire, plus de 2.500 euros nets par mois, et pour un couple 3.700 euros mensuels. Ce sont les 20% de Français qui gagnent le mieux leur vie. Contrairement aux autres ménages, les 80% restants, ils continuent à payer la taxe d'habitation en 2020.
Ils vont donc la voir baisser d'un tiers en 2021, à l'automne, lorsque cette taxe est due, puis encore un tiers en 2022 et le dernier tiers en 2023. À supposer bien sûr que l'élection présidentielle de 2022 ne compromette pas cet échéancier, c'est-à-dire que le nouveau président reprenne à son compte cet engagement de l'actuel gouvernement.
Ces 20% de Français les plus aisés constituent une catégorie très hétérogène, puisqu'elle rassemble à la fois une partie de la classe moyenne, et les très hauts revenus, peu nombreux. Ceux qui gagnent plus de 13.000 euros nets par mois pour un couple par exemple, qui représentent un ménage sur cent.
Il y a en France 640.000 ménages au-dessus de ce seuil des 1% les plus riches. Et il y a 6.400 personnes dans notre pays qui gagnent plus de 110.000 euros par mois, soit un Français sur dix mille. Donc vous voyez que cette suppression de la taxe d'habitation concerne à la fois les très riches, les riches, et les tout petits riches, qui sont de loin les plus nombreux.
Même s'il y a toutes chances que les victimes de la crise actuelle soient plutôt dans les revenus faibles, il fallait faire ce "cadeau" au 20% les plus riches. Il y avait une raison juridique : le Conseil constitutionnel a explicitement demandé que la suppression de la taxe d'habitation s'applique à tous les Français, faute de quoi il y aurait eu rupture de l'égalité devant l'impôt.
Il y a aussi une raison politique. C'est dans cette classe moyenne supérieure que se trouvent plutôt les bataillons d'électeurs d'Emmanuel Macron. Un petit cadeau fiscal avant la présidentielle, ça ne peut pas faire de mal. D'autant que cette catégorie sociale n'a pas beaucoup profité de la détaxation des heures supplémentaires, elle en fait peu, et pas beaucoup non plus de la baisse de l'impôt sur le revenu, concentré sur les tranches basses.
Les seuls à avoir eu déjà un gros cadeau, dans cette catégorie, c'est le haut du panier, ceux qui ont profité de l’allègement important de l'impôt sur le capital, lorsque l'ISF a été réformé, en 2018.
Tout cela va représenter un manque à gagner important pour l'État, tout ça. Au total, 17 milliards d'euros, qui allaient jusqu'ici aux collectivités locales, les mairies en premier lieu. L'État s'est engagé à compenser ces ressources, en versant aux maires une partie de la TVA collectée nationalement, pour qu'ils ne soient pas privés de ressources. Mais ça ne veut pas dire que cette taxe disparaîtra complètement.
La taxe d'habitation subsistera pour les résidences secondaires, et pour les logements non occupés. Ceux-ci étant même frappés, dans les zones en tension, par une surtaxe, pour inciter les propriétaires à le mettre sur le marché.