ÉDITO - Pourquoi Sanofi arrête-t-il la production de Doliprane ?

Les laboratoires Sanofi ont perdu près de 19% à la bourse et ont annoncé, vendredi 27 octobre, qu'ils se séparaient du Doliprane. Cette chute est liée à de mauvaises perspectives sur les résultats des deux prochaines années. Les marchés financiers, eux, sont plutôt favorables à l'idée d'abandonner la division "Santé Grand Public" qui comprend le Doliprane, d'autres médicaments sans ordonnance et des compléments alimentaires.

Ces produits grand public représentent 12% du chiffre d'affaires, mais ça ne rapporte pas assez, aux yeux des marchés financiers, parce qu'il s'agit de médicaments dont le prix reste bas. Sur ces produits-là, vous avez peu de marge et, chaque année, le gouvernement français réfléchit à réduire le prix ou le niveau de remboursement ou la franchise pour boucler son Projet de Loi de Finance de la Sécurité Sociale. C'était encore le cas cette année et, pour l'instant, les mesures d'économies de ce type sont écartées. Mais ça reviendra. Lorsque vous êtes un industriel du médicament, vous ne misez donc pas sur le paracétamol.

Qu'en est-il de notre "souveraineté médicale" ?

Un des enseignements du COVID était qu'il fallait préserver notre "souveraineté médicale" et recommencer à produire du Doliprane en France. Le 16 juin 2020, Emmanuel Macron, justement en déplacement chez SANOFI, déclarait : "tout le monde a vu durant cette crise que des médicaments qui paraissaient usuels n'étaient plus produits en France et en Europe. Je souhaite d'ailleurs qu'avec SANOFI, nous continuions dans cet esprit de partenariat pour reproduire, conditionner et distribuer du paracétamol en France". Le Président avait alors annoncé une enveloppe de 200 millions de l'État pour favoriser le retour de la production de paracétamol en France pour ne plus être dépendants de la Chine ou de l'Inde.

Ce pôle "Santé Grand Public" qui comprend le Doliprane, aujourd'hui, ce sont 13 sites de production dans le monde (Lisieux dans le Calvados et Compiègne dans l'Oise), 11 000 salariés, 125 marques environ (il y en avait 250 il y a 5 ans). À Lisieux, on vient d'annoncer de nouveaux investissements (20 millions d'euros) pour produire plus de Doliprane. Donc, Sanofi ne va pas totalement abandonner cette entité. Il va lui donner une certaine autonomie.

Sanofi se concentre sur la recherche

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Sanofi va créer une nouvelle société cotée qui reprendra le portefeuille des marques grand public. Le laboratoire pourra en être actionnaire, mais les investissements du groupe n'iront plus vers cette division qui vivra sa vie, toute seule. Le concurrent GSK a déjà fait ça, il y a quelques mois, pour ses médicaments sans ordonnance. Quel est l'avenir d'une entreprise qui n'innove plus, mais qui produit (sans doute plus cher sur le long terme que la Chine ou l'Inde) un médicament qui ne rapporte pas grand-chose ? C'est toute l'inquiétude des salariés aujourd'hui. Aujourd'hui, le Doliprane est une rente pour Sanofi en attendant de trouver un nouveau vaccin ou un nouveau médicament.

SANOFI redevient un laboratoire de recherche qui travaille sur quelques vaccins et quelques médicaments contre le cancer, l'immuno-inflammation, l'hématologie. Le laboratoire cherche des médicaments qui vont lui rapporter de l'argent dans les prochaines années. Un "blockbuster" comme les gros films américains. On utilise le même terme en pharmacie. N'oublions jamais que SANOFI a été un des grands absents de la crise du COVID en accumulant des retards sur la mise au point de son vaccin.

Le groupe fait donc des choix. Il va chercher à réaliser deux milliards d'économies dans les deux ans pour les injecter dans la recherche. C'est tout le paradoxe d'un pays qui favorise le Crédit Impôt Recherche (7 milliards par an) et délaisse son industrie depuis trop longtemps.

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