ÉDITO - Comment la banane est devenue le fruit préféré des Français

Dans quatre jours, ce sera officiel : jamais les Français n'auront autant mangé de bananes qu'en 2024, avec près de 750.000 tonnes consommées. Ce record permet à la banane de détrôner la pomme en tant que fruit préféré des Français, selon l'Institut Kantar. La consommation de bananes a progressé de 6%.

Aujourd'hui, chaque Français consomme en moyenne 11,5 kilos de bananes par an, soit environ une centaine de fruits, ce qui équivaut à deux par semaine. Cette augmentation s'explique par le caractère nourrissant de la banane et son prix abordable.

Selon l'association interprofessionnelle de la banane, le prix moyen est de 1,86 € le kilo. La barre des 2 € le kilo est un seuil en grande distribution, d'où des prix souvent fixés à 1,99 € plutôt qu'à 2 €. Un prix contenu, précieux en période d'inflation.

Le fruit a gagné en compétitivité ces dernières années. Son prix a augmenté trois fois moins vite que le reste de l'alimentaire : seulement 7% depuis 2020, contre plus de 20% en moyenne dans les supermarchés. Cependant, ce succès pourrait être éphémère, car les exportations mondiales viennent de passer sous la barre des 20 millions de tonnes, un niveau inédit depuis des décennies.

Pourquoi les exportations baissent-elles ?

C'est à cause du réchauffement climatique. La banane provient majoritairement d'Afrique (40% de la production mondiale), des Antilles (35%) et d'Amérique Latine. Ces régions sont de plus en plus touchées par les inondations, les sécheresses et les cyclones, poussant certains producteurs à changer de culture. En Équateur, premier exportateur vers l'Europe, la part de fruits exportés a été réduite d'un cinquième.

Les catastrophes climatiques entraînent souvent des maladies, comme la Cercosporiose noire, qui attaque les feuilles et accélère le mûrissement du fruit. Les bananes arrivent souvent en France déjà mûres, rendant leur vente difficile selon les critères de la grande distribution. Les pertes sont considérables, au point que la filière française fait du lobbying pour autoriser l'utilisation de pesticides par drone. Une proposition de loi devait être examinée début décembre à l'Assemblée, mais cela a été interrompu par la dissolution.

Que propose la filière ?

La filière travaille sur le développement de nouvelles variétés résistantes aux maladies. La Cavendish, ultra-représentée parmi les bananes à dessert, domine le marché. Pour diversifier les variétés, il nécessite un travail scientifique et génétique qui se fait avec tous les fruits et légumes, mais à cette difficulté près : la banane contient peu de graines, ce qui complique la tâche.

La filière négocie également avec la grande distribution pour revoir les critères de sélection. Actuellement, seules les bananes très jaunes sont vendues, et celles avec des taches noires sont jetées, un immense gâchis, car elles sont souvent meilleures.

Si rien ne change, les prix risquent-ils d'augmenter ?

Oui, c'est la loi de l'offre et de la demande. Moins d'offre face à une demande croissante entraîne une hausse des prix. Le prix abordable est un facteur clé du succès de la banane. Cependant, il y a encore de la marge avant d'atteindre le prix de la banane la plus chère du monde : 6,2 millions de dollars, une "œuvre d'art" achetée puis mangée le mois dernier par un entrepreneur américain lors d'une conférence de presse.

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