Dans son "plan eau", présenté ce jeudi 30 mars, Emmanuel Macron a insisté sur la pédagogie et les petits gestes individuels. Et c'est une bonne chose pour l'hydrologue Emma Haziza. "Ouvrir son robinet et voir de l'eau qui coule instantanément peut sembler être un geste magique. Mais en réalité, cela demande beaucoup d'énergie. Dès lors, moins nous allons solliciter cette eau, moins nous allons consommer d'énergie, et moins nous allons prélever sur le milieu. De fait, nous allons préserver plus d'eau pour le milieu naturel. C'est donc aller dans le bon sens que de mettre en place des gestes individuels", souligne la spécialiste.
Seulement, Emma Haziza regrette l'absence de grands acteurs de l'eau dans le plan présenté par Emmanuel Macron, et notamment les milieux industriels et agricoles. "Ce sont les plus grands postes de consommation d'eau, c'est donc là qu'il y a une action à mettre en œuvre", déplore-t-elle. Elle assure toutefois que, même s'il n'est pas visé par ce plan, "le milieu industriel devra de toute façon se questionner sur son usage de l'eau."
La timidité des appels à la sobriété pour le monde agricole est dès lors le point qui déçoit le plus l'hydrologue. "Ce qui est prévu dans ce plan eau tend à renforcer le modèle existant, alors même qu'il ne semble pas compatible avec ce vers quoi on va tendre", déplore-t-elle, regrettant au passage la position du gouvernement sur les bassines d'irrigation. "Ce n'est pas une bonne solution en soi. Ce n'est pas viable sur le long terme et tout le corpus scientifique s'accorde à le dire. C'est une forme d'appropriation de l'eau pour un usage au détriment d'autre", assure-t-elle.
Elle est rejointe sur ce point par François Gemenne, membre du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), pour qui les bassines d'irrigation sont devenues "une question très politique". "Ce qui s'est passé à Sainte-Soline le week-end dernier est un conflit politique, celui de savoir à quoi veut-on allouer une ressource qui devient de plus en plus rare", analyse-t-il. "Jusqu'ici, nous avons considéré que l'eau était une ressource quasiment illimitée, abondante et donc, nous nous sommes jamais posé la question de ses usages. Mais maintenant qu'elle devient plus rare, il va falloir trancher et dire à quoi nous voulons l'allouer."
En outre, pour François Gemenne et Emma Haziza le "plan eau" présenté par Emmanuel Macron ne répond pas à la question de la qualité de l'eau, alors que "aujourd'hui encore, on retrouve des produits phytosanitaires et des pesticides à peu près dans toutes nos rivières et nos nappes".
Quant à l'objectif fixé par le chef de l'État de faire passer la part d'eaux usées réutilisées de 1 à 10 % d'ici à 2030, "c'est une idée extrêmement intéressante, mais qui a ses limites, car elle demande beaucoup de technologies et nous avons besoin d'innover sur le sujet", analyse Emma Haziza.
"Nous avons trop attendu, rebondi François Gemenne. Nous nous sommes contentés d'être dans la moyenne européenne - qui est de 2 % - et avons attendu d'être pied au mur pour réagir. Or, la clé face au changement climatique, c'est l'anticipation. Plus on va anticiper, plus on va pouvoir s'adapter facilement, et plus nous allons réduire le risque de tensions et de conflits autour des ressources."
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