Qu'ils se définissent comme "féministes", "pro-féministes" ou "alliés", les hommes ont un rôle à jouer dans le mouvement pour l'égalité. Mais selon notre sondage RTL Girls et WondHer, réalisé avec BVA, seuls 49% des hommes interrogés se disent "féministes" alors que la majorité d'entre-eux (près de 7 hommes sur 10) ont compris que ce sujet concerne aussi bien les hommes que les femmes et qu'il s'agit avant toute chose d'une question d'égalité.
Pourtant, il est essentiel que les hommes comme les femmes s'approprient ce mot et surtout les valeurs qu'il transmet. Pour les besoins de cet article, RTL Girls a interrogé plusieurs hommes engagés à leur échelle sur ces questions d'égalité. Tous tiennent plus ou moins le même discours : être féministe, c'est prendre conscience qu'il y a des inégalités, les rejeter et faire en sorte de les faire disparaître.
Tous ont également conscience qu'un homme féministe ne sera pas engagé de la même façon qu'une femme... C'est pour cela que certains préfèrent le terme d'allié ou de pro-féministe et que d'autres refusent qu'un homme puisse se dire "féministe".
"Il y a l'idée selon laquelle quelqu'un qui ne vit pas les oppressions patriarcales, et qui au contraire y participe même inconsciemment, ne peut pas prétendre être féministe", explique Thomas Messias, 34 ans, professeur de mathématiques dans un lycée général et technologique de Roubaix et animateur du podcast Mansplaining, sur les masculinités.
"Il y a aussi le fait que les hommes toxiques, dangereux, misogynes, sont si nombreux et si exposés, que beaucoup de femmes ne veulent tout simplement pas entendre parler des hommes lorsqu'elles mènent des combats féministes. Comment les blâmer", poursuit-il en expliquant comprendre ces convictions. "Je suis d'accord en très grande partie, même si je pense qu'aller vers un monde plus féministe passe aussi par le fait de pousser les garçons et les hommes à se comporter différemment, à s'éloigner du rôle auquel on les a destinés", souligne encore Thomas Messias.
Par souci de clarté et de continuité dans cet article, nous emploierons en grande majorité l'expression "homme féministe".
Au fur et à mesure que je grandissais, j’ai compris que la femme était discriminée
Maxime Haes, chef de projet digital
Maxime Haes, 25 ans, est chef de projet digital et raconte avoir grandi dans une famille "absolument humaniste et tolérante" mais dans laquelle le partage des tâches était très stéréotypé : "Ma mère faisait le ménage, la cuisine, quand mon père bricolait dans le garage, s'occupait de la voiture", raconte-t-il, sans jugement.
Gamin, il s’interroge sur cette répartition des rôles puis, plus tard, sur la façon dont sont représentées et traitées les femmes dans la société. C'est grâce à ses fréquentations au lycée qu'il commence à s'ouvrir à ces sujets. Puis, c'est en prépa qu'il échange pour la première fois, sur Twitter, avec des groupes féministes.
"Au fur et à mesure que je grandissais, que j’apprenais, que je lisais, j’ai compris que la femme n’était pas seulement placée ou traitée différemment dans la société, elle était, elle aussi, discriminée", explique Maxime qui, étant gay, "comprend à 100%" le concept de discrimination.
Il y a donc ceux que le féminisme est venu toucher dès l'enfance. Pour d'autres, il a fallu attendre une rencontre marquante, ou être soi-même victime de discrimination, en raison de son orientation sexuelle par exemple, pour pouvoir comprendre l'ampleur des discriminations subies par les femmes.
Si l'adoption du mot semble avoir été naturelle pour Maxime, d'autres ont mis plus de temps avant de le comprendre. Arnaud Auger Sengupta, entrepreneur de 30 ans, raconte qu'il y a encore 5 ans, il refusait le mot "féministe" au profit d'un autre terme, plus générique : "humaniste".
"Le féminisme ne m’apparaissait que comme le versant féminin du machisme, prônant un déséquilibre de l’autre extrême", se souvient-il. Il a fallu attendre un voyage en Inde, et une discussion avec une amie indienne, lors d'un dîner pour le faire changer d'avis.
Cette dernière a alors expliqué : en "utilisant le terme 'humaniste', je cachais le fait que l'extrême majorité des inégalités femmes-hommes étaient au détriment des femmes. En faisant cela, je faisais partie du problème et non de la solution", raconte Arnaud, qui a d'ailleurs pris le nom de son épouse, rencontrée en Inde. Une rareté.
"En acceptant de me définir comme 'féministe', a fortiori en tant qu’homme, je reconnaissais que le problème était d’abord à l’encontre des femmes et je devenais une partie de la solution !".
Même si les mentalités commencent à évoluer, se dire féministe quand on l'est reste plus difficile pour les hommes que pour les femmes, selon une majorité d'hommes (voir notre sondage). Les raisons de cette réserve peuvent être diverses, selon les cas.
François Taing, étudiant en communication de 22 ans, estime par exemple qu'il est compliqué "de se définir féministe aujourd'hui parce que beaucoup d'hommes en ont abusé pour avoir une bonne image, d'autres le sont par opportunisme". On peut comprendre alors la méfiance de certaines personnes envers ceux qui affichent fièrement leur engagement auprès des femmes quand, en coulisses, les choses ne se passent pas exactement de la même façon.
"Au travail, c'est un vrai effort pour certains car il y a la menace parfois d'une hiérarchie, du regard des autres, de passer pour quelqu'un de 'fragile' car on ne participe pas aux ambiances machistes entre collègues masculins", analyse de son côté le producteur Maxime Ruszniewski, cofondateur de La Fondation des Femmes.
Ce qui est difficile, c'est de subir les discriminations, pas de les combattre
Arnaud Auger Sengupta, entrepreneur
On l'a par exemple vu récemment dans le monde journalistique avec l'affaire de La Ligue du LOL. Parmi les groupes de personnes que ces hommes journalistes insultaient et harcelaient : des hommes remettant en question leur masculinité et questionnant la virilité.
Thomas Messias est l'une de leurs victimes et selon lui, si ses confrères ont pris pour cible des hommes engagés, c'est parce que ces derniers restent une minorité. "On est des cibles faciles".
Pour eux, véhiculer des valeurs féministes, "c'est considéré comme le comble du ridicule", ajoute Thomas Messias qui voit également dans ces comportements une forme de "peur de perdre un jour une partie de leurs privilèges, qu'ils considèrent comme des acquis".
Arnaud Auger Sengupta tient un discours plus tranchant. Pour lui, il n'est pas difficile d'assumer son engagement pour l'égalité. "Ce qui est difficile, c'est de subir les discriminations, pas de les combattre quand on est soi-même épargné !".
"Comment vivre dans un monde dans lequel la moitié de l'humanité continue d'être discriminée massivement sur tous les tableaux ? Comment s'intéresser aux autres inégalités sans s'attaquer à la première d'entre elles ?", lance le producteur Maxime Ruszniewski avant de rappeler qu'être féministe, c'est faire preuve d'humanité. Pour vos "filles, femmes, sœurs, nièces... mais aussi pour toutes les femmes que vous ne connaissez pas à travers le monde".
Ludovic Arnold, responsable informatique à l'IUT de Saint-Brieuc, 42 ans, confie de son côté l'importance de donner l'exemple à ses enfants. "Si je ne le fais pas, je serais mal dans ma peau. Si je ne le fais pas, je serais responsable."
J'ai envie de pouvoir me regarder dans la glace le matin
Thomas Messias, professeur et journaliste
Pour s'engager, Xavier Abaul, 33 ans et militant pour SOS Homophobie à Paris, conseille comment faire : vous pouvez vous "documenter grâce à des ouvrages, reportages, sites internet de mouvements féministes, aller à la rencontre des militantes comme celles et ceux de SOS Homophobie, du Centre LGBT Île-de-France ou au Planning familial".
Plus concrètement, vous pouvez vous inspirer des hommes interrogés dans cet article. François Taing, à sa "petite échelle", comme il le dit, ouvre le dialogue avec ses collègues, signe des pétitions, s'informe et partage des posts sur les réseaux sociaux tandis que Maxime Haes réagit quand il le peut lors d'une agression dans l'espace public (intervenir, appeler les forces de l'ordre).
D'autres vont utiliser leur rôle au sein de leur entreprise pour faire remonter des demandes spécifiques concernant l'égalité, mentorer des femmes pour qu'elles puissent obtenir une augmentation ou l'égalité salariale, veiller à constituer des équipes paritaires ou encore s'interroger sur les processus de recrutement pour attirer plus de femmes dans des métiers dominés par les hommes (comme l'informatique, par exemple).
Tous ne tolèrent aucun propos sexiste de la part de leur entourage et beaucoup rappellent l'importance de savoir s’effacer dans son féminisme. Comment ? En sachant par exemple "relayer la parole des militantes féministes qui s'expriment sur les réseaux sociaux", détaille Thomas Messias.
Maxime Haes ajoute : "Je pense qu’il est essentiel d’écouter, d’abord, les concernées, de leur laisser la parole et de se taire, plutôt que de tenter de se faire une place juste pour se placer, ou donner son avis, juste pour donner son avis. Le but ici étant de comprendre les enjeux, d’abord pour soi, ensuite pour les autres. Et l’écoute de celles qui le vivent au quotidien est nécessaire."
Si François Taing estime que "les meilleurs combats sont ceux qui sont inconnus et qui ne demandent pas de reconnaissance derrière", Thomas Messias juge cependant que les hommes "ont besoin de modèles qui les inspirent".
Le professeur précise alors sa pensée : "Loin de moi l'idée de m'ériger en role model, mais je pense en tout cas que si un nombre croissant d'hommes se revendique pro-féministe et défend bec et ongles les valeurs qui y sont liées, cela ne pourra qu'encourager d'autres hommes encore à rejoindre le mouvement. Il faut montrer qu'on peut être un homme pro-féministe et être très heureux, loin de l'image du soumis castré que certains aimeraient bien nous imposer."
À l'approche de la Journée internationale des droits des femmes, RTL Girls et WondHer s'associent pour mettre fin au tabou du féminisme avec un objectif : que 100% des Françaises et des Françaises se déclarent féministes et embrassent cette vision de la société : un monde plus égalitaire est possible et, surtout, nécessaire.
Pour remplir cet objectif, RTL Girls et WondHer appellent ses lecteurs et lectrices à donner leurs solutions, partager des propositions pour faire de ce mot une identité revendiquée. Commentez nos articles, écrivez-nous sur nos réseaux sociaux, utilisez le hashtag #ToutesEtTousFéministes, envoyez-nous des mails (ariele.bonte@girls.fr) et retrouvons-nous, dès le 8 mars, pour faire changer les mentalités.
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