Pourquoi BlueSky attire les déçus de X (Twitter) depuis l'élection de Donald Trump

L'histoire ne dit pas encore si cette énième alternative à Twitter saura s'implanter durablement dans le paysage informationnel, mais la plateforme Bluesky surfe depuis quelques jours sur une vague de popularité inédite dans sa jeune histoire. La réélection de Donald Trump et l'utilisation politique de X (ex-Twitter) par son propriétaire Elon Musk dans la campagne présidentielle américaine ont convaincu des centaines de milliers d'utilisateurs de migrer vers ce réseau social au fonctionnement similaire lancé en 2021 pour offrir une alternative décentralisée à Twitter. 

Alors qu'il ne comptait que 10 millions d'inscrits en septembre, Bluesky a franchi la barre des 20 millions d'utilisateurs le 19 novembre, se hissant au sommet des magasins d'applications d'Apple et Google aux États-Unis et figurant parmi les services les plus installés sur les smartphones en France, au Canada, au Royaume-Uni et dans plusieurs pays européens depuis le 6 novembre. Ces chiffres d'utilisation restent modestes par rapport à X, qui revendiquait près de 400 millions d'utilisateurs l'an dernier, mais ils traduisent un rejet des dérives de la plateforme qui n'a jamais semblé aussi manifeste depuis la prise de pouvoir d'Elon Musk au printemps 2022.

Si l'élection présidentielle américaine a achevé de consacrer la transformation de X en un instrument de pouvoir au service des idées de plus en plus droitières du milliardaire américain, les griefs envers le réseau social vont au-delà de son utilisation politique. Ses lacunes de plus en plus assumées dans la modération des contenus, son rôle central dans la polarisation des débats, son amplification des contenus extrêmes, de la désinformation et des discours haineux dessinent un tableau de moins en moins supportable pour une frange de ses 400 millions d'usagers qui n'ont jamais paru aussi enclins à aller voir si l'herbe n'est pas plus verte ailleurs.

Un réseau social plus bienveillant

Ces derniers jours, les publications d'utilisateurs invitant leurs abonnés à les suivre sur Bluesky se sont multipliées sur X. On retrouve parmi eux des célébrités, comme Jamie Lee Crutis ou Stephen King, mais aussi des médias comme le quotidien régional Ouest-France, le quotidien britannique The Guardian et leur homologue espagnol La Venguardia. "La campagne électorale américaine a confirmé ce que nous pensions depuis longtemps : que X est une plateforme sociale toxique et que son propriétaire, Elon Musk, a pu l'utiliser pour façonner le discours politique", a ainsi expliqué The Guardian dans un article sur son site.

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Si l'interface épurée de Bluesky n'est pas sans rappeler celle de Twitter, les internautes se félicitent surtout d'y trouver un environnement plus pacifié, pas encore dégradé par les bots et les comportements toxiques, où les discours modérés ne sont pas écrasés par les invectives. Ils apprécient aussi son fil d'actualité dénué de publicité et plus facile à suivre, où les algorithmes d'engagement ne dictent pas l'ordre d'affichage des publications. Pas besoin de faire défiler les polémiques du jour, les vidéos choquantes et les discussions d'inconnus pour trouver les contenus des comptes qui les intéressent, Bluesky se contente d'afficher les publications des comptes suivis de façon chronologique. Des fonctionnalités font encore défaut : il n'y a pas de possibilités d'enregistrer des publications ou de créer des salons de chat audio. Mais la plateforme permet depuis sa dernière mise à jour de créer des listes thématiques de comptes à suivre et d'envoyer des messages privés.

Difficile de dire si cette formule, qui rappelle le Twitter historique, sera de nature à bousculer X. Depuis l'avènement de Twitter, à la fin des années 2000, aucun réseau social n'a réussi à contester le leadership de la plateforme numéro un de microblogging. Qu'il s'agisse de politique, de sport, de culture, de finance ou de business, Twitter puis X sont restés l'endroit incontournable pour suivre et commenter l'actualité. Malgré ses nombreux défauts et ses errements stratégiques, le réseau social fondé par Jack Dorsey a toujours pu s'appuyer sur des communautés actives et pointues dans tous les domaines qui lui confèrent un effet de réseau dont il est très difficile de s'extraire. L'exode vers Bluesky devra continuer encore longtemps pour que les nouveaux arrivants ne soient plus tentés de retourner sur X pour voir s'ils ont manqué quelque chose.