Le spectre du 49.3. L'examen du projet de réforme des retraites entre dans sa deuxième semaine à l'Assemblée nationale. Tout ceci dans une ambiance qui s'électrise de jour en jour. En 65 heures d'échanges, nuit et jour, week-end compris, les députés n'ont examiné que 1.800 amendements sur les 34.000 restant à étudier.
Une course contre la montre est lancée depuis plusieurs jours pour le gouvernement qui initialement souhaitait l'adoption du texte avant les élections municipales des 15 et 22 mars. Pour que le calendrier puisse tenir au vu des 41.000 amendements déposés, les députés siégeront jusqu'au 6 mars.
Un hémicycle qui tourne donc au ralenti. Au sixième jour de débats, les députés ont adopté deux premiers amendements concernant les aidants familiaux et le handicap. Ce climat brouillon et de perpétuelles tensions, notamment entre le président de l'Assemblée et le groupe La France insoumise, fait émerger la possibilité d'un recours au 49.3.
Pour comprendre pourquoi l'hypothèse d'un éventuel recours au 49.3 refait surface, il est nécessaire de remonter le temps. Retour au 18 février dernier : le projet de loi arrive à l’hémicycle. Les députés commencent à débattre et déjà les rapports paraissent tendus. Et pour cause, l'examen en commission n'a pas pu s'achever à cause de l'avalanche d'amendements, principalement déposés par la France insoumise.
Avec leur 23.000 amendements, la France insoumise joue la carte de l'obstruction parlementaire. Une stratégie politique qui vise à ralentir les débats et retarder le vote d'un projet ou d'une proposition de loi. En quoi cela consiste-t-il ? L'objectif est de multiplier les amendements. Autres options : multiplier les rappels au règlement dans l'hémicycle et utiliser tous les instruments de l'Assemblée, comme la motion de censure.
Une tactique assumée dans les rangs de l'opposition. Contactée par RTL.fr, Clémentine Autain députée La France insoumise, évoque une "grève de zèle". "Nous nous servons de tous les leviers dont nous disposons afin de ne pas rendre la tâche facile au gouvernement et centrer le débat sur le fond du projet", explique-t-elle.
Face à l'enlisement des débats, certains au sein de l'exécutif et de la majorité seraient tenter de recourir au 49.3. Un choix cornélien pour faire aboutir la réforme, mais qui pourrait coûter cher à quelques semaines des élections municipales. Pour rappel, l'article 49 alinéa 3 de la Constitution permet au Premier ministre d'engager la responsabilité du gouvernement devant l'Assemblée nationale sur un texte de loi. Le projet de loi est alors considéré comme adopté sans vote, sauf motion de censure votée par l'Assemblée.
Le gouvernement laisse ainsi planer le doute et explique que "rien n'est exclu" quant à l'utilisation du 49.3. Élément de langage martelé par Gille Le Gendre, le patron des députés LaREM à l'Assemblée mais aussi par certains membres du gouvernement. Mais du côté de LaREM, comme de LFI, personne ne veut porter le chapeau de l'usage de cet article. La majorité dénonce la pression de l'opposition. Et le mouvement mené par Jean-Luc Mélenchon affirme que les "marcheurs" le "préparent" en surjouant le "chaos".
L'article 49.3 est aussi un révélateur des faiblesses de La République En Marche. À peine ressouder par Emmanuel Macron après le couac sur le congé de deuil pour enfant, le parti présidentiel se retrouve une nouvelle fois tiraillé sur sa gauche. Une poignée d'élus LaREM de l'aile gauche ne "veulent pas" que le 49.3 soit considéré comme la "seule issue".
Qui y perd dans cet affrontement ? "Tout le monde a un peu à y perdre. Le gouvernement, s'il en vient au 49.3, montre qu'il na pas pu échapper à la faute vers laquelle l'opposition l'a poussé. L'opposition prend le risque de monter qu'elle cherche à tout prix à s'opposer à quelque chose pour lequel le gouvernement a été élu", analyse Bruno Cautrès, politologue, au micro de RTL. Majorité et opposition cherchent donc une porte de sortie. La députée Clémentine Autain évoque auprès de RTL.fr une possibilité pour le gouvernement, largement évoquée par la France insoumise : retirer le texte et organiser un référendum.
Édouard Philippe a rendu visite dimanche 23 février aux députés de la majorité pour discuter de l'option à envisager pour le 49.3. Sacha Houlié, député LaREM de la Vienne, est contre. "Moi, parlementaire, je ne suis pas demandeur de la procédure de rationalisation qui est le 49.3. J'ai du temps devant moi, j'ai aucun mal à passer nuit et jour à l'Assemblée nationale pour démontrer que ce que je pense est bon pour les Français".
Certains députés de la majorité préparent depuis plusieurs jours les esprits au 49.3. Patrick Mignola, élu MoDem de Savoie, y est lui favorable. "On nage en plein désordre. L'Assemblée nationale est devenue une espèce de théâtre d'ombre où on dit un mot pour un autre, on prétend débattre alors qu'on ne débat pas. Tout le monde est en train de mentir. Il ne faut pas faire un 49.3 qui a pour objectif de brutaliser les mentalités, il faut faire un '3.49', un 49.3 à l'envers, pour dépasser les obstructions de l'opposition", dit-il.
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