Le 18 juin 2024, Emmanuel Macron justifiait sa décision de dissoudre l'Assemblée nationale par la volonté d'éviter la "chienlit". Originaire de la moquerie et du folklore, ce terme a été introduit dans le langage politique moderne par le général Charles de Gaulle lors des événements de Mai 68. Il est également présent dans la culture littéraire, dans L'Assommoir d'Émile Zola et dans Nana.
Le terme "chienlit" est un idiotisme, issu du verbe "chier" et du mot "lit", qui fait référence à un personnage de carnaval en chemise de nuit, souvent lié à la tourmente et à l'incapacité de se contenir. Son usage remonte depuis le XVIe siècle, et est mentionné pour la première fois dans le Gargantua de Rabelais en 1534. Les fouaciers, qui confectionnaient des pains cuits sous la cendre, étaient alors qualifiés de "boyers d’étrons" et de "bergiers de merde".
La "chienlit" se transforme au XIXe siècle en un personnage du Mardi gras. Le "chienlit" est décrit par le Dictionnaire de l'Académie française de 1835 comme un personnage qui se promène dans les rues en chemise de nuit, couvert de moutarde lors du carnaval de Paris, représentant un désordre social et moral.
Le concept de chienlit fait son entrée dans l'histoire politique avec le général de Gaulle. Le 19 mai 1968, alors que des révoltes étudiantes et des grèves générales ébranlent la France, de Gaulle affirme : "La réforme, oui ; la chienlit, non !" Selon Georges Pompidou, cette phrase, gaullienne, était destinée à condamner les mouvements sociaux en cours.
Cependant, la réponse ne tarde pas à venir. Les contestataires sont immédiatement inspirés par la désuétude du terme et son caractère moqueur, ils décident de détourner l'expression en affichant : "La chienlit, c'est lui !". De Gaulle est représenté en marionnette sur des affiches de l'Atelier populaire des beaux-arts de Paris, ce qui renforce l'image du président déconnecté de la réalité sociale et politique du pays.
Depuis lors, différents acteurs politiques ont utilisé le terme "chienlit" pour dénoncer le désordre et exprimer une position d'autorité. Le terme est utilisé en 1994 par le ministre de l'Intérieur Charles Pasqua pour dénoncer les manifestations contre le contrat d'insertion professionnelle (CIP). Nicolas Sarkozy, en campagne pour les régionales de 2015, affirme : "Dans la République française, on veut l'ordre, on veut l'autorité et la protection pour chacun. On ne veut pas la chienlit."
Toutefois, l'utilisation du terme peut être risquée. Lorsque Nicolas Sarkozy parle de "chienlit" en 2015, suite à l'agression de deux responsables d'Air France par des syndicalistes, cela provoque une vague de moqueries sur Internet et des détournements graphiques qui évoquent ceux de Mai 68.
De Rabelais à De Gaulle, en passant par les mouvements sociaux de Mai 68 et les usages contemporains, "chienlit" demeure un symbole fort du désordre et de l'anarchie, tout en étant un outil de rhétorique pour les politiques qui cherchent à se présenter comme garants de l'ordre.
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