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Macron, Castex et Revel : zoom sur ce trio qui va diriger la France

DÉCRYPTAGE - Le "nouveau chemin" ambitionné pour la fin du quinquennat passera par le président de la République, le Premier ministre et son directeur de cabinet. Trois hommes qui ont déjà l'habitude de collaborer ensemble.

Emmanuel Macron, Jean Castex et Nicolas Revel
Emmanuel Macron, Jean Castex et Nicolas Revel
Crédit : AFP
Marie-Pierre Haddad

Macron-Castex-Revel. Voici les noms des trois hommes à la tête de l'État : le président de la République, le Premier ministre et le directeur de cabinet de ce dernier. Le départ d'Édouard Philippe et l'arrivée de son successeur, Jean Castex, marque un tournant dans la fin du quinquennat d'Emmanuel Macron

Le président de la République tente de donner une nouvelle impulsion à deux ans de l'élection présidentielle sur le plan politique, mais le chef de l'État souhaite aussi revoir la concentration des pouvoirs. Et quoi de mieux que de s'entourer de personnes ayant une expérience clé : celle d'ancien secrétaire général adjoint de l'Élysée. 

À quoi sert un secrétaire général adjoint de l'Élysée ? "C'est l'équivalent d'un directeur de cabinet. C'est un poste capital, confié généralement à des proches du président de la République qui ont un profil de haut fonctionnaire", explique Pierre-Emmanuel Guigo, maître de conférences en histoire contemporaine à l'université Paris-Est-Créteil à RTL.fr.

Le retour des hauts fonctionnaires à l'Élysée et Matignon

Emmanuel Macron, Jean Castex et Nicolas Revel ont un point en commun et pas des moindres. Ils ont tous les trois occupés le poste de secrétaire général adjoint de l'Élysée. Le premier a occupé ce poste, sous François Hollande. Et il sera en tandem... avec un certain Nicolas Revel. Emmanuel Macron était en charge des questions économiques et celui qui est devenu directeur de cabinet du premier ministre gérait la question des affaires sociales et sociétales. "Ils s'y étaient entendus comme larrons en foire, en dépit de caractères très différents - Nicolas Revel est plutôt taiseux et sérieux", souligne Le Journal du Dimanche.

Quant à Jean Castex, ce dernier a officié à ce poste à la fin du quinquennat de Nicolas Sarkozy. "Un casting curieux, selon Pierre-Emmanuel Guigo. Emmanuel Macron a nommé quelqu'un de sage et de mature ayant une connaissance approfondie des rouages de la politique, tout en étant un élu de terrain". 

Ce trio à la tête de l'Élysée et de Matignon signe donc le retour en force de la haute fonction publique au sommet de l'État. "Des années 60 aux années 80, ce sera le triomphe des énarques. Nicolas Sarkozy signera la fin de leur règne, lui qui n'a pas fait l'ENA. À l'inverse, François Hollande a fait l'ENA mais va décider de s'entourer de personnes qui n'ont pas le même parcours politique que lui, comme Manuel Valls ou encore Jean-Marc Ayrault", analyse le maître de conférences en histoire contemporaine à l'université Paris-Est-Créteil.

Macron - Revel, une "relation exigeante et sincère"

La nomination de Nicolas Revel au poste de directeur de cabinet à Matignon n'est pas franchement une surprise. Emmanuel Macron et Nicolas Revel "sont amis, selon Philippe Grangeon, conseiller spécial du chef de l'État. Ils ont une relation exigeante et sincère". En 2017, Emmanuel Macron avait déjà proposé à Édouard Philippe "de le prendre pour bras droit", rappelle Le Monde. Mais l'ancien membre des Républicains refusera et nommera un de ses proches, Benoît Ribadeau-Dumas.

Âgé de 54 ans, ce proche d'Emmanuel Macron a été diplômé de l'ENA en 1993, avant de devenir conseiller à la Cour des comptes. À noter qu'il est aussi proche de l'ancien maire de Paris Bertrand Delanoë, dont il a été directeur de cabinet. Auparavant, Nicolas Revel avait été pressenti pour succéder à Gérard Collomb au poste de ministre de l'Intérieur. 

"Nicolas Revel a été la cheville ouvrière des réformes de la santé menées par Marisol Touraine puis Agnès Buzyn", explique le quotidien qui souligne qu'il a eu la délicate mission de la mise en place du tiers payant généralisé, une promesse de François Hollande. Pour résumer, "Revel, c'était vraiment un mec de gauche. Il n'envisageait absolument pas de travailler avec la droite", expliquait un ancien du cabinet de François Hollande au Journal du Dimanche. Et de poursuivre : "Il a du sens politique. Il sait que même si on a construit les meilleurs plans du monde, si on n'a pas la majorité pour les faire appliquer, ce n'est pas la peine". Même s'il n'a jamais pris sa carte au Parti socialiste, précise L'Obs

Macron - Castex, pas de friture sur la ligne ?

Quant à Jean Castex, Emmanuel Macron a une nouvelle fois fait le choix de nommer un inconnu du grand public au gouvernement. Certains y verraient un signe que le président de la République reprend les rênes, toujours dans l'objectif de faire appliquer le "nouveau chemin", annoncé pour la fin du quinquennat. 

C'est Édouard Philippe en personne qui donnera quelques clés permettant de mieux cerner le nouveau premier ministre qui a émergé sur le devant de la scène avec la délicate mission de mettre en place le déconfinement. Lors de la passation de pouvoir, le maire du Havre a loué son "sens politique", ainsi que sa "connaissance fine du pays" et "l'intelligence" du haut fonctionnaire qui saura, selon lui, "prendre les bonnes décisions". 

"Je ne suis pas ici pour chercher la lumière, je suis ici pour chercher des résultats", a-t-il assuré d'emblée le nouveau premier ministre, lors d'une interview sur TF1. Autre message envoyé : Jean Castex se décrit, comme son prédécesseur, comme étant "de la droite mais est un gaulliste social". Selon Martial You, chef du service économie de RTL, rappelle que "ce mouvement correspond à l'époque des 'Trente Glorieuses' où la croissance permettait aussi de financer le modèle social". "C'est assez intelligent de la part d'un inconnu comme Jean Castex de s'afficher comme un gaulliste social. Ça lui donne un 'génome', un 'corpus' politique qui rassure. De Gaulle est inattaquable. Il n'est ni de gauche ni de droite donc De Gaulle est macroniste", ajoute-t-il. 

Selon Olivier Bost, éditorialiste politique chez RTL, entre Emmanuel Macron et Jean Castex, c'est "le Président qui décide, le Premier ministre qui exécute". "Et l’avantage avec Jean Castex, précise un proche d’Emmanuel Macron, c’est que 's’il y a des doutes pour une décision, c’est dit avant pas pendant'. En creux, ce sont les défauts d’Édouard Philippe, ces défauts devenus insupportables qui sont pointés", analyse-t-il. 

Un entre-soi qui pourrait leur porter préjudice ?

Avec Jean Castex et Nicolas Revel, Emmanuel Macron s'entoure de ses proches. Ces nominations devraient apporter "plus de cohérence dans la vision de la fin du quinquennat et dans leur vision de l'État", juge Pierre-Emmanuel Guigo, auteur de la biographie Michel Rocard, aux éditions Perrin. Mais d'après lui, cela pourrait accentuer les critiques déjà nombreuses à l'encontre du chef de l'État sur la "déconnexion à l'égard de la population". "Ça reste un entre-soi très fort et cela risque d’accentuer ce travers", ajoute-t-il. 

Autre conséquence : les ministres du gouvernement Castex I "n'auront plus la même marge de manœuvre", mais cela devrait "diminuer les couacs et les polémiques au sein de l'exécutif, comme la tête est gérée par trois personnes ayant une vision commune", note Pierre-Emmanuel Guigo.

"Ça envoie un message très clair aux partenaires sociaux. C'est sans doute ça le plus important d'ailleurs. Il connait les syndicats et le patronat, c'est son aquarium. Donc l'Élysée envoie un gage très fort. Et le binôme Castex (de droite) et son directeur de cabinet, Nicolas Revel (de gauche) sont deux références dans le dialogue social. Ils vont rassurer", explique de son côté Martial You.

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