Les "gilets jaunes" ont "profondément modifié le quinquennat", explique Olivier Bost
EDITO - De nouveaux appels pour des rassemblements voient le jour du côté des irréductibles "gilets jaunes", qui restent dans le radar du gouvernement.

C’est un constat, les "gilets jaunes" peinent à subsister. Ils sont quelques centaines par-ci par-là. Ils n’occupent plus les chaines d’informations pendant des heures et des heures.
Il n’y a plus du tout de mouvement de masse comme on l’a connu à la fin de l’année dernière et en début d’année. En fait, il n'y a plus que des irréductibles. Mais ça n’est pas pour autant terminé.
Et quand vous en parlez avec des ministres ou des responsables de la majorité, ils se montrent tous très prudents, voire inquiets. "Il n’y a plus d’incendie immédiat, mais les braises couvent", explique l’un d’eux et "ça peut repartir de rien". Car ce qui n’a pas disparu, bien sûr, c’est le ras-le-bol fiscal, ce sentiment de relégation et parfois de solitude.
Les ministres le voient bien car sur le terrain, à quasiment chacun de leur déplacement, il y a un comité d’accueil. Quelques gilets jaunes pour se rappeler à leurs mauvais souvenirs.
Et puis des "gilets jaunes" se greffent aussi à des mouvements locaux, là pour la grève des urgences, ailleurs pour une manifestation contre l’action de la police. En fait, même s’ils le voulaient, les ministres ne pourraient pas les oublier complètement.
Beaucoup moins de pression
Concrètement, aujourd’hui au quotidien, il y a beaucoup moins de pression. Mais c’est comme si, avec la pause estivale, ce moment où l’on prend un peu de recul, le traumatisme avait refait surface dans les étages supérieurs du pouvoir. Comme si Emmanuel Macron et ses équipes avaient cet été pris conscience de ce qui leur était arrivé.
À ses proches, le chef de l’État le dit : "À un moment, on aurait pu basculer dans autre chose", tout aurait pu s’écrouler. C’est pour ça que pour sa rentrée, il a changé de registre. Fini les réformes à toute allure. Emmanuel Macron parle de réconciliation, de consultation, de négociation.
Les "gilets jaunes" n’ont pas seulement obtenu presque 20 milliards d’euros, ils ont profondément modifié le quinquennat. L’acte 2, il ne faut pas s’y tromper : c’est eux.
Impact sur la réforme des retraites
C’est donc pour ça, par exemple, que la réforme des retraites va prendre beaucoup beaucoup de temps. Voici ce que m’a dit un proche d’Emmanuel Macron : "Ce qui est très important, c’est de ne pas faire une Juppé". C’est-à-dire de ne pas se retrouver avec une partie du pays bloqué, comme en 95 et avec une opinion qui bascule en faveur des grévistes.
D’où ces idées de consultations permanentes. Plusieurs ministres utilisent cette image : "Il s’agit de faire venir les Français dans la cuisine", pour participer aux recettes. Il faut associer et convaincre. En réalité, il s’agit surtout d’un numéro d’équilibriste. Emmanuel Macron doit désamorcer tout mouvement d’humeur ou de contestation, même les plus insignifiants, pour ne pas revivre ce qu’il a vécu.
Pour ça il devra faire des concessions et en même temps, il doit continuer à bouger, à réformer même lentement même prudemment, sinon son quinquennat est terminé. Les "gilets jaunes" ne sont plus sur les ronds-points et dans les rues, mais ils sont encore dans toutes les têtes.
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