ÉDITO - Loi immigration : "Borne a repris son rôle de cheffe d'orchestre et c'est elle qui donne le rythme", selon Alba Ventura

Élisabeth Borne ne ménage pas sa peine pour tenter de trouver une issue à la loi immigration. Depuis l'échec du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, elle enchaîne réunion sur réunion. C'est un sacré retournement de rapport de force. Ça ne veut pas dire qu'elle va réussir, mais enfin, jusqu'à mardi dernier, jusqu'à ce coup de théâtre, cette motion de rejet contre la loi immigration, c'est Gérald Darmanin qui menait la danse. Aujourd'hui, Élisabeth Borne a repris son rôle de cheffe d'orchestre et c'est elle qui donne le rythme. Elle le fait en y mettant toute son énergie parce qu'elle est opiniâtre. Bosseuse, engagée, elle se bagarre.

Ce qui frappe surtout, c'est son côté résilient. Elle encaisse, mais elle revient et elle est à la tâche parce qu'elle considère qu'elle a une mission. Il faut dire aussi qu'elle n'est pas débordée par son ego, contrairement à certains. Son seul défaut, c'est qu'elle ne protège pas le président, elle n'est pas un rempart mais cela n'empêche pas qu'aux yeux d'Emmanuel Macron, elle a le sens du devoir. C'est une préfète et il peut compter sur elle. Elle a laissé faire le ministre Darmanin, elle l'a regardé faire. Elle disait que le travail de Darmanin était de faire passer cette loi, sous-entendu qu'il ne s'éparpille pas en pensant par exemple à Matignon le matin en se rasant. Oui, elle doit éprouver une petite satisfaction à voir que celui qui voulait sa place a échoué.

Attention, même si les adversaires réclament de parler uniquement à Élisabeth Borne, même si tout le monde défile dans son bureau, elle ne se fait pas d'illusions. Parce qu'elle sait que, depuis la réforme des retraites, elle a un contrat court. Elle n'a pas regagné de points politiquement, elle n'a pas réussi à construire de majorité, notamment sur les textes à fort enjeu politique. Elle voit tout le monde s'agiter autour d'elle, tous ces gens qui se sentent pousser des ailes, qui veulent sa place. Elle sait très bien qu'en janvier, elle peut être remerciée.

Sa force est d'être dans cette attitude de serviteur de l'État. Peut-être pense-t-elle que son dévouement lui donnera du temps. Mais c'est mal connaître le président et tous les présidents d'ailleurs. En attendant, en jouant l'apaisement, la négociation, l'échange, elle a réussi à se replacer au centre du jeu. Elle ne se fait pas d'illusions, mais elle n'a sans doute pas renoncé à renouveler son CDD.

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