ÉDITO - "Élisabeth Borne a du mal à exister", estime Alba Ventura
Alba Ventura s'étonne de la discrétion d'Élisabeth Borne dans un contexte d'augmentation des actes antisémites. La Première ministre a pourtant "une histoire personnelle", puisque que son père a connu l'enfer du camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau.
Deux anciens Premiers ministres à la Une du Journal La Tribune Dimanche, ce 5 novembre. Édouard Philippe et Bernard Cazeneuve ont été réunis pour un appel commun contre l'antisémitisme et pour la République. Un autre ex-Premier ministre, Manuel Valls, publie lui aussi un appel "Français, réveillez-vous". Alors que Bruno Le Maire a choisi X (anciennement Twitter) pour s'exprimer sur le Proche-Orient sous le hashtag #jesuisfrançais.
Et Élisabeth Borne dans tout ça ? La Première ministre est légitime, elle a une histoire personnelle. C'est elle qui devrait faire la Une des journaux ou le 20h. Au moment où le climat se tend, où l'inquiétude monte, où l'on renvoie des Français à leur religion, cela mériterait d'entendre une parole forte de la part de la cheffe du gouvernement.
On a l'impression qu'elle ne s'autorise pas. Alors, elle n'est pas restée muette, elle s'est exprimée à l'Assemblée nationale. Mais qui regarde les débats à l'Assemblée ? On aurait pu imaginer qu'elle soit davantage sur le devant de la scène. Alors elle doit donner une interview ce lundi 5 novembre, mais cela arrive presque un peu trop tard.
Ce n'est pas rien d'être fille de déporté et de voir des étoiles de David sur les murs ! Elle a du mal à exister, c'est comme si elle n'arrivait pas à sentir les moments importants. Les mots manquent, la solennité manque. Elle a des choses à dire, à transmettre, encore une fois ne serait-ce qu'au nom de sa propre histoire.
"Toute la majorité a un problème de leadership"
Certes, on est dans un moment intense sur le plan international avec un président qui est très présent sur toutes ces questions. Et très présent tout court, on l'a vu sur l'IVG, la langue française, la tempête.
Cela laisse peu de place, il est vrai, mais dans des moments de crise pareille, la Première ministre devrait s'emparer du micro, parler, se trouver des espaces, en posant des actes de communication forts sur le plan intérieur. Et non en apparaissant comme celle qui gère les affaires courantes et qui enchaîne la litanie des 49.3.
Cela dit, ce cercle infernal des 49.3 a fini par plomber l'ambiance dans toute la Macronie. Les députés de la majorité n'affichent plus un grand moral. Ils se sont fait élire pour porter le débat, non pour regarder passer les motions de censure. Sans compter la loi immigration qui arrive d'abord au Sénat sans trop savoir dans quel état elle reviendra à l'Assemblée. Finalement, c'est toute la majorité qui a un problème de leadership !
Un changement de Première ministre ?
Certains en rêvent évidemment, et la rumeur court déjà qu'il y aura un nouveau locataire à Matignon en janvier prochain.
Ce qui est certain, c'est qu'il faut surtout changer de rythme, changer de braquet. La majorité est encalminée en réalité depuis la réforme des retraites. Et la Première ministre ne peut pas seulement donner l'image d'une gestionnaire qui ne sert qu'à faire passer les textes budgétaires.
Tout ça manque de ligne, de souffle. Soit elle montre qu'elle est une leader, soit elle se fera piétiner par ses petits camarades du gouvernement. Ou d'ailleurs.
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